Revue de revues

Chronique de Georges Cathalo

Revue de revues

Spered Gouez N°22 (2016)

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Cette belle revue annuelle fête ici son 25° anniversaire sous les meilleurs auspices avec une exergue d’Edgar Morin : « La vie c’est la poésie. C’est de l’effusion, de la communion, de l’amour, de la fraternité ». On y trouve matière à assouvir sa soif de bonne poésie grâce à de solides présentations, à de copieuses notes de lecture qui aiguillent le lecteur hors des sentiers battus. En ces temps improbables, composer un dossier de revue poétique sur le thème « éloge de la frontière » peut sembler un tantinet provocateur. Il faut aller directement aux pages 82/83 pour comprendre vraiment le sens de ce choix. Une vingtaine d’auteurs se sont engouffrés dans cet « open space » pour traquer les pièges du « tout ouvert » dont la principale conséquence est « l’absence d’une délimitation indispensable entre la sphère sociale et la sphère privée ». Marie-Josée Christien, responsable de ce dossier dénonce « l’injonction de la transparence » car elle « crée de la confusion et conduit à l’uniformisation de la pensée ». Signalons encore « L’avis de tempête » dans lequel Jean-Luc Pouliquen présente une forte mise au point en dénonçant l’injustice « d’un système qui repose essentiellement sur de l’argent public » afin de privilégier certains auteurs à la mode au détriment de poètes plus discrets.

Spered Gouez N°22 (2016), 148 pages, 16 euros –7 allée Nathalie-Lemel – 29000 Quimper ou spered.gouez@orange.fr


Friches N°122 (2016)

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Comme tous les deux ans avec Friches, le 3° et dernier numéro de l’année écoulée présente le lauréat du Prix Troubadours. Pour ce 19° Prix, c’est Antoine Maine qui en est l’heureux bénéficiaire. Ce poète est récompensé pour un ensemble intitulé « Une vie avec du ciel ». Auteur peu lu, il donne à lire pourtant une poésie ample au lyrisme maîtrisé. Ses poèmes présentent une belle cohérence et une assurance dans la structuration de chaque texte au point qu’il serait dangereux d’en extraire un passage. Il faut lire Antoine Maine et se laisser guider dans son univers apaisant dans lequel la montagne occupe une large place. À la suite de ce bel ensemble de 35 pages, on peut lire des extraits poétiques des cinq autres poètes nominés. Ce qui ressort de tous ces écrits, c’est une étonnante maturité dépassant largement les questions d’âges, d’origines et de professions. Même si l’on connait bien les difficultés que rencontrent les éditeurs, on regrettera que ces poètes et tant d’autres encore aient du mal à trouver des lieux où l’on puisse lire leurs écrits. L’on ne remerciera jamais assez les revuistes pour leur générosité et pour leur ouverture d’esprit en les accueillant ainsi. Avec ce nouveau numéro de Friches, les lecteurs sont assurés de trouver des poèmes de qualité présentés comme toujours de remarquable façon.

Friches N°122 (2016), 68 pages, 12,50 euros ou 25 euros pour les 3 numéros annuels – Le Gravier de Glandon – 87500 Saint-Yrieix ou jeanpierre.thuillat@wanadoo.fr


Écrits du Nord N°29-30 (2016)

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Dans son éditorial intitulé « Au lecteur », Jean Le Boël affirme sa détermination à s’inscrire dans une perspective différente des publications commerciales. Les auteurs retenus participent d’une communauté de pensée et d’action. Ils constituent une sorte de « famille vivante, complexe, brouhaha de voix ». Il ne s’agit pas ici d’école littéraire ou de mouvement poétique mais d’accorder à des poètes la place qu’ils méritent. Afin de ne pas hiérarchiser les heureux élus, la rédaction les présente dans l’ordre alphabétique. Ainsi, de Jean Azarel à Dominique Tissot, 29 poètes sont présents au sommaire dans une belle diversité de forme et de fond. Citons-en quelques-uns et quelques-unes : Chantal Couliou, Ludovic Joce, André Duprat, Hervé Martin, Hélène Duboeuf, Murièle Modely,… Après une articulation de transition où Georges Rose propose des réflexions « Sur la poésie », on découvre des récits et des nouvelles de sept écrivains, de Michel Baglin à Colette Touillier. Dans cette copieuse livraison d’ Écrits du Nord, le lecteur pourra savourer des textes de haute tenue littéraire et partir à la découverte d’univers inconnus.

Ecrits du Nord N°29-30 (2016), 152 pages, 12 euros – Ed. Henry – Parc de Campigneulles – 62170 Montreuil-sur-Mer et http://www.editionshenry.com


À l’index N°31 (2016)

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La revue À l’index se décline en deux séries. Il y a tout d’abord la collection Empreintes qui a présenté 9 numéros spéciaux consacrés à des poètes tels que Werner Lambersy, Jean-Max Tixier ou Hervé Delabarre. Il y a ensuite les numéros ordinaires où voisinent suites poétiques, nouvelles et notes critiques. Et puis il y a enfin ce numéro 31 entièrement consacré au riche compte-rendu des journées de Tarn-en-poésie. Ces rencontres sont organisées par ARPO, la dynamique association tarnaise connue en particulier pour être à la tête du Conservatoire des revues de poésie de Carmaux avec plus de 35000 volumes. Cette année, pour la 34° édition, Jean-Louis Giovannoni était le poète invité. Jean-Claude Tardif l’a suivi tout au long se son périple allant de classe en médiathèque pour en dresser ici un fidèle compte-rendu où figurent les échanges avec les élèves et leurs dévoués professeurs. Le point d’orgue de ces journées fut la soirée du 8 avril en présence d’un nombreux public, soirée animée par Emmanuel Laugier, grand connaisseur de l’œuvre de Giovannoni. On lira avec intérêt les 35 pages extraites d’un recueil inédit intitulé Les Moches. On lira également les surprenants poèmes écrits par les collégiens et par les lycéens. En fin de revue, juste avant une imposante bibliographie, trois poètes amis de l’invité (Bernard Noël, James Sacré et Jean-Claude Tardif) livrent des approches différentes et complémentaires de l’œuvre si riche et si singulière de Giovannoni.

À l’index N°31 (2016), 174 pages, 17 euros – 11 rue du Stade 76133 Epouville ou revue.alindex@free.fr


Arpa N°115/116 (2016)

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Avec Arpa, le lecteur curieux ne sera jamais déçu car il trouvera là de quoi assouvir sa faim. Placée sous l’invitation générique de « Je vous écris », cette livraison offre un éventail de textes d’une rare richesse et d’une généreuse diversité. Plus d’une cinquantaine d’auteurs se côtoient dans un sommaire étourdissant. On y trouve ainsi quelques grands noms de la poésie mondiale : les Italiens Quasimodo et Pusterla, les Grecs Themelis et Tsatsos, l’Espagnol Unamuno et tant d’autres encore. Les « valeurs sûres » de la poésie contemporaine française sont bien là, accordées au thème retenu : Georges Bonnet, Antoine Emaz, Jacques Ancet ou Jean-Pierre Lemaire. De même pour des poètes très actifs comme Jean-Yves Masson, Josette Ségura ou Ivan de Monbrison ainsi que des membres de la génération nouvelle : Jean-Baptiste Pédini, Déborah Heissler ou Jean-Marc Sourdillon. On ne saurait passer sous silence les quatre lettres manuscrites reproduites ici mais on laissera au lecteur le charme et la surprise de la découverte… Des études, chroniques et lectures complètent parfaitement ce qui pourrait être un exemple pour d’intrépides poètes qui voudraient se lancer dans l’aventure revuistique. « Toutes voiles dehors, pendant quarante ans » proclame ce numéro double ; ce pourrait être aussi l’oriflamme derrière lequel se rangerait Arpa pour poursuivre sa route magistrale.

Arpa N°115/116 (2016), 208 pages, 15,50 euros port compris – 148 rue Dr-Hospital 63100 Clermont-Ferrand ou 44 rue Morel-Ladeuil -63000 Clermont-Ferrand ou gerardbocholier@orange.fr


Les Hommes sans Épaules N°42 (2016)

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Cette revue nous a habitués à de copieuses livraisons semestrielles et celle-ci ne déroge pas à la règle que se sont fixés Christophe Dauphin et son équipe rédactionnelle. Ici, dès l’éditorial, les prises de position sont clairement affirmées dans la lignée d’un humanisme à la fois tolérant et intransigeant. Si par exemple l’on rend un hommage mérité à Yves Bonnefoy, c’est pour en circonscrire l’oeuvre féconde et non pour ajouter une voix louangeuse supplémentaire au concert posthume. On lira tout d’abord les textes percutants des « porteurs de feu » que sont l’Allemand Hans Magnus Enzensberger et le Hollandais Cees Nooteboom qui n’usurpent pas ce titre. Claude Pélieu a droit à un dossier-hommage présenté par deux spécialistes de la beat génération, avec, encadrant le dossier, les écrits de 14 poètes très divers ; cela va des Américains Gregory Corso, Bob Kaufman et Lawrence Ferlinghetti aux Français Gérard Cléry, Vim Karénine et Frédéric Tison sans oublier Odile Cohen-Abbas, Jacqueline Lalande et Martine Callu. On lira encore un long entretien avec Virgile Novarina qui permet de redécouvrir l’itinéraire artistique du provocateur Pierre Pinoncelli ainsi que d’autres volets qu’il serait trop long de présenter. Pages libres et notes de lecture complètent ce numéro d’une grande qualité littéraire et surtout d’une parfaite cohérence dans les choix éditoriaux.

Les Hommes sans Épaules N°42 (2016), 324 page, 17 euros – 8 rue Charles Moiroud – 95440 Ecouen ou les.hse@orange.fr

©Georges Cathalo – décembre 2016