Catherine Andrieu, Les ailes du papillon, une publication de l’Altérité 2024, 14, avenue Edouard Grinda, 0620 Nice.

Catherine Andrieu, Les ailes du papillon, une publication de l’Altérité 2024, 14, avenue Edouard Grinda, 0620 Nice.


Les ailes du poète ont la fragilité apparente des ailes du papillon. Trop grandes, inadaptées, en papier, le pigment qui les colore a texture de poussière. Le poème est-il fait pour durer? Pour contredire nos attentes? Pour diffuser un message amoureux ou au contraire éloigner les potentiels prédateurs?

Les poèmes de Catherine Andrieu évoquent une fragilité mais aussi une sorte de fougue intérieure difficile à canaliser, une passion turbulente que ne domptent pas l’amour, le sexe, la consommation d’alcool, de drogues et l’utilisation de la violence. 

Que répondre à la question qui fonde la personne « qui suis-je? » quand on est papillon? Quand le bouillonnement nous fait souffrir et qu’on maîtrise sans doute moins que les autres la faculté de maintenir un cap dans les tempêtes? 

Pour Catherine Andrieu, la vie s’apprivoise alors par l’écriture, écriture de poèmes et écriture de peintures. Les peintures au couleurs vives ne sont pas sans rappeler l’usage que les ailes du papillon font de la couleur. Je pense ici à la répartition harmonieuse selon un de spectre de couleurs invisibles pour l’oeil humain. En effet des photographies solarisées ou des pellicules photographiques sont manipulées et transformées par ajouts de couleurs, accentuation de formes. À l’instar des ailes du papillon, les peintures peuvent être perçues par un regard dont le spectre est différent ou autrement étendu. Les lectures s’étalent ainsi sur plusieurs niveaux.

L’écriture questionne le corps, son pouvoir érotique mais aussi les principes d’une domination qui s’exerce sur lui. Certains poèmes témoignent d’une violence subie et qui détruit tout sur son passage en commençant par la confiance. Les poèmes donnent un vol erratique à la poète mais lui permettent sans doute de revenir à ce qui la fonde en profondeur, d’analyser le passé sans regret. D’agir sur le présent.

Dans ce livre la poète et la peintre se répondent, se parlent, se dévoilent. Les ailes du papillon sont tour à tour peintures aux couleurs vives et chatoyantes d’où s’évadent messages sensuels allant jusqu’à un érotisme dévoyé, cru, brutal. Les poèmes parfois osent des mots, des images qui fondent les questionnements légitimes à propos du corps, objet de tous les désirs, à propos du corps comme berceau de la personne que l’on est, que l’on voudrait être, que l’on sera ou que l’on ne deviendra jamais.

Ce livre est comme une errance de papillon pourvu d’une résilience à toute épreuve. Le livre interroge le regard: celui que l’on porte ou supporte à peine, celui presque éteint que la société consumériste impose au corps féminin notamment.