Une chronique de Xavier Bordes
Christophe Mahy, À jour passant, poèmes (Ed. Gallimard – NRF.)
Cette série de courts poèmes, d’un auteur que je ne connaissais pas, mérite la lecture ; et d’être méditée, souvent. Le titre éclaire fort bien ce beau livre de quelques cent vingt textes environ, qui ravivent avec simplicité, mais non pas platitude, la qualité d’une « présence au monde » rendue constamment précieuse par l’inoubli sous-jacent, parfois explicite mais jamais pesant, de la condition de mortel qui est la face obscure du vivant… La simplicité poétique s’exprime ici avec un ton de sérénité légère et pourtant profonde, des accents limpides et des formulations heureuses, dont voici deux exemples (p. 132 & 133) :
Là
entre les herbes
l’eau emmène
ce qui reste du jour
derrière les murs
au fond du val
l’ardeur des mains jointes
ranime le matin
comme s’il fallait à tout pris
désigner
ce que nous n’avons de cesse
d’écrire.
Ou encore :
Passant en quête
d’instants perdus
et d’heure arrêtée
te voilà livré
à un exil dérisoire
car tes voyages sont incertains
mais tu maintiens
envers et contre tout
le cap sur le soir précoce
où les landes font
de grandes trouées d’ombre
que le vent dénoue
autour des bornes.
J’ai beaucoup aimé ce livre plein d’une poésie consciente d’elle-même, de son rapport sans naïveté aux choses de la nature, à l’existence de ce qu’elle rencontre avec un regard qui pense sans prétention, avec un œil clair, droit, nourri d’une surprise juste effleurée, qui n’effarouche pas et rend ses couleurs à son univers familier. Un recueil qui sera un bon compagnon pour commencer lucidement, mais de façon apaisée, cette nouvelle année omicronnée !
merci
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