Michel Bénard, Les caresses du ciel, Éditions les Poètes Français, 1er trimestre 2021 ; préface de Jean-Pierre Paulhac ; 1ère de couverture d’Alain Bonnefoit, « L’innocente ».

Une chronique de Rome Deguergue

Michel Bénard, Les caresses du ciel, Éditions les Poètes Français, 1er trimestre 2021 ; préface de Jean-Pierre Paulhac ; 1ère de couverture d’Alain Bonnefoit, « L’innocente ».


L’amour se flétrit sous la contrainte ; son essence même est la liberté. Il n’est compatible ni avec l’obéissance, ni avec la jalousie, ni la peur. 

Cette citation du poète, Percy Bysshe Shelley exprime avec justesse ce que le poète, Michel Bénard introduit dans cette ode à la sensualité, illustrée dans le recueil, Les caresses du ciel.

Ah ! Tout ici n’est qu’harmonie, complicité, partage, recherche authentique de « la philosophie du bonheur » et à aucun moment il n’y sera question de flétrissure, de jalousie, de peur ou de domination.

Car, Les caresses empreintes d’émoi vibrant, de frémissements sensuels sont les prémisses qui mènent au vertige d’intense jouissance du septième ciel. 

Confiance et respect de l’autre, désir du désir sans cesse renouvelé, jeux amoureux, mais aussi envolée lyrique, élévation d’âme, transfiguration, vision iconique se font l’écho de certains « mythes et légendes », mais aussi de poèmes éperdus d’amour issu du Cantique des Cantiques, tels ces vers :

 « Mon bien-aimé est pour moi un bouquet de myrrhe, qui repose entre mes seins » ;

« Comme un lis au milieu des épines, telle est mon amie parmi les jeunes filles ».

Le champ / chant lexical célébrant Éros « en majesté » se révèle tantôt cru/ vrai sans une once de vulgarité, tantôt soutenu. La sensualité se double d’érotisme à l’évocation : 

« de cette échancrure / De longue robe noire, / Ouverte sur l’infini de votre intimité ; De prusses soies offrant / Nuances et transparences ; De folie libertine ; De vos songes en dentelles ; Le tintement des hauts talons »…

Ne nous y trompons pas, il est ici bien question d’un hymne à la vie ; hymne à la femme De flamboyante énigme inconnue / reconnue, désirée, aimée, « Que le peintre voudrait dessiner, / Que le poète rêve de composer ».

À la fois Pygmalion, mendiant de cette envoûtante vestale le poète se confie ainsi : 

« Me voici tremblant, / Comme un homme fasciné, / Troublé, enfiévré, envoûté, / Par la liberté que me révèle / L’intégrale beauté de votre corps, / Avide et fébrile ma main se tend / Vers ce trésor dénudé /(…) Corps en gloire, ébloui, / Comme un lys mystique, / Face au phallus tendu / Vers l’inconnu, / Vers l’absolu, / Offert au souffle du monde / Dans l’ultime et l’intime / D’une transcendante jouissance. »

« Je voudrais boire vos sèves de femme, / je voudrais m’abreuver à vos seins /Des miels de vos désirs / Cueillir les gerbes d’Amour / aux flots de vos impudeurs, / en laissant nos sexes / se mêler, s’exalter, s’abandonner, / sous les ardeurs / D’une aveugle fougue / Tissée de folles passions. »

Au mitan du recueil, oh ! le voussoiement fait place au tutoiement et se poursuit en alternance tout au long du recueil :

« À l’ombre fragile / Des lignes galbées de tes seins, / Mes doigts glissent doucement, / Jusqu’à nos lèvres réunies, /(…) Les érotiques caresses de tes mains / Éveillent le flot de mes sèves,(…) ».

Puis au détour de poèmes, tous adressés à la femme aimée, comme psalmodiés et devenus partageables via l’écriture offerte tant à la femme qu’au lecteur, le poète se fait tour à tour : réflexif, analytique, lucide et rêveur, à propos de ces – ici & maintenant – de l’amour éternel  vécu dans la liberté, l’offrande authentique. Le poète transfigure une nouvelle fois ces instants par cet autre art qu’il pratique avec autant de talent, à savoir la création picturale :

« En sa flamboyance / La femme devient soudain / Ce rayon de vie, /Cette embellie, /Que le peintre ébauche / Patiemment et amoureusement /Sur le grain de sa toile de lin, /Durant que le poète la réinvente / Superbe en sa création, /Encore plus belle / Tel un défi inconscient / Qu’il lance aux dieux / Du temple de l’Olympe. ».

Les dessins & autres peintures de femmes nues ou dénudées, créés par sept (ah, ce chiffre 7 !) compagnons de route de Michel Bénard font ici écho à ses poèmes, Où l’amour bourgeonne / Entre deux tresses de lumière /(…) D’une informelle prière…  à lire, à relire, à rêver, à méditer, à partager, à réaliser  :

« Pour tendre soudain / Vers la perfection / D’une ligne calligraphique. ».

Arcachon, juin 2021

© Rome Deguergue