Une chronique de Barbara Auzou
Jeanne Champel Grenier, Les éternaliens, Éditions France Libris.
Elle est retrouvée.
Quoi?- L’éternité.
( Arthur Rimbaud/ Derniers vers.)
C’est la bonne nouvelle que nous annonce “ Oeil de Diplo”, cet éternalien plus éclairé que ses congénères.
De quoi s’en réjouir?
Certainement pas. Mais d’en rire malgré tout et d’en rire franchement.
Cette fable mordante, d’un humour tendre et si lucide est entièrement illustrée par l’auteure.
Et les illustrations sont pures, primitives à souhait.
Sur la première de couverture, trois éternaliens. L’un laisse pendre ses bras désabusés. Le second salue, le troisième semble célébrer une victoire du vide, sous un soleil en spirale qui n’est pas sans rappeler le signe des Premières Nations qui est un portail, une communication avec une autre dimension, comme un “ trou de ver” entre deux univers.
On suit les réflexions tour à tour volontairement naives ou férocement lucides d’Oeil de Diplo et de ses congénères “ lassés de tout sur cette terre” en riant de nous-mêmes et en nous promettant de ne jamais plus oublier de vivre:
“ Méfiez-vous, hommes du futur, méfiez-vous de ces soi-disant gourous éclairés qui se tuent à vous dire que l’immortalité est l’avenir de l’homme” car sans “ la voie du repos éternel” qui fait le sens de la vie, on s’amoindrit si bien que:
“ Les singes, nos cousins germains”, nous imitent. Par chance, les hippopotamus nous ont enseigné le barbotum d’argile, ce qui nous donne un teint terreux, mais calme, jusqu’au changement de lune.”
L’amour lui-même est devenu grande fatigue:
“Mon beau-frère tripolaire ( sic!) âgé de 15502 ans cette année, lui qui a trois femmes sacrées qui chantent le “ Yavachtéou” à la tombée du jour pour faire taire les lépidoptères nocturnes, fait désormais après une nuit d’amour des apnées du sommeil de cent ans.”
On avance. On avance. Tu ne vois pas qu’on n’a pas assez d’essence pour faire la route dans l’autre sens chantait Souchon. Et :
“ Les humains dégoûtés du présent perpétuel, n’ayant jamais trouvé le moyen radical de disparaître. Et quoique certains soient usés jusqu’à la trame, déformés, estropiés et frappés d’idiotisme, voient le nombre total d’êtres vivants demeurer irrémédiablement fixe et de niveau d’intelligence en chute libre, inférieur à celui des parasites qui les habitent.”
Oh oui j’ai ri. D’un rire sonore et vaste.
Merci à l’Homo Habilis particulièrement éclairé qu’est Jeanne Champel Grenier de nous rappeler à la vie, de nous rappeler qu’il nous faut la mériter et que l’humour est le plus clair chemin d’un être à un autre.


Merveilleux ! ❤️❤️❤️
J’aimeJ’aime