Une chronique de Jeanne Champel Grenier
ÉCORCE – Poésie et photographies de Kathleen Hyden-David – 2021
Préface de Claude Luezior, ISBN : 978-2-38268-107-7, Ed. France Libris
Touchée jusqu’à l’aubier par cette plongée en forêt de Fontainebleau près de laquelle je vécus enfant, orpheline hébergée par une tante, je peux dire qu’en ces bois j’ai plus cherché à retrouver la protection et le visage des êtres chers que je n’y ai débusqué le muguet. C’est dire si les photos de Kathleen Hyden-David, photos à main levée ( puisqu’il s’agit d’un portable) m’émeuvent comme s’il s’agissait de photos de famille.
Il y a là d’immenses arbres dont les écorces s’expriment à hauteur de visage d’homme. Il est si facile d’y trouver soit un avertissement, soit une bienfaisante connivence, soit un trait d’humour. La forêt aux grands arbres bras levés protecteurs est notre plus ancienne famille, notre thébaïde première, notre originelle lecture de la vie. Elle l’est encore pour de nombreux peuples que l’on dit avec mépris »primitifs » car ils sont dépendants d’elle, mais ils la protègent ; ils nous la protègent. L’auteur a décidé de retrouver les liens qui retiennent l’homme, le font tenir debout et capable de s’interroger sur le but de la vie. Souvent présence humaine, l’écorce se livre à celui qui essaie de communiquer sans hache ni tronçonneuse : on est surpris par »ces regards immobiles » (p.21) qui observent sans agressivité le promeneur. On est appelé à se souvenir des Divinités antiques qui furent si longtemps compagnes ou ennemies de l’homme avec leurs chevelures de Gorgone… (p.19). La forêt est un livre ouvert rempli de signes que l’on interprète positivement ou négativement selon l’humeur de l’instant ; c’est un monde qui nous inclut avec ses mille pages-miroirs qui s’ouvrent au rêve tel ce »galop des ombres…coursier du vent »que semble croiser la poète solitaire : »Au galop vers l’horizon mes bras enlacent le cavalier’‘ (p.23).
Dans ce livre, sans estampille mercantile »écologique », l’auteur, Kathleen Hyden-David, par ses mots précis et sans emphase, nous remet au centre de l’essentiel : le rêve grand compensateur de vie ; c’est ce leitmotiv que l’on entend dans le moindre souffle, la moindre ombre, le moindre éclat de lumière : »Esprit, laisse faire le rêve ». N’est-ce pas une des plus belles définitions de la poésie ?
Lire ce recueil »ÉCORCE » qui nous interpelle, nous extrait du monde factice, nous replonge dans les débuts de migration humaine en recherche de protection et d’harmonie sur cette terre où demeurent les arbres de longue et haute mémoire, n’est-ce pas un bonheur ? Car l’homme, qu’est-il au final ? »Juste un insecte sur son écorce » (p.65).
©Jeanne CHAMPEL GRENIER
L’INCONNU
Se laisser emporter
sur le sentier du rêve
quand apparaît
l’animal inconnu
Museau de hérisson
et fourrure de chien
de quelle planète
cette météorite animale ?
Corps incrédule
entre méfiance
et étonnement
elle cherche sa destinée
Rester à distance
ne pas l’effrayer
pour celui d’un ailleurs
l’inconnu c’est moi
L’être m’entend respirer
et ne s’enfuit pas
né de mon regard
il est moi, je suis lui
Merci à vous pour la parution de cette recension. Amitié Jeanne Champel Grenier
Le lun. 16 août 2021 à 16:43, Traversées, revue littéraire a écrit :
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