Jérôme Attal, L’âge des amours égoïstes, Robert Laffont, ( 19€- 221 pages), novembre 2021.
Si Jérôme Attal a déclaré son amour pour la capitale londonienne, il n’hésite pas à mettre Paris (qu’il connaît comme sa poche), au coeur de ses livres.
Rappelons :
– 37, étoiles filantesoù il nous fait déambuler dans le Paris des années 1937, en particulier dans le Montparnasse mythique, en compagnie de Giacometti.
&
– un livre jeunesse :Duncan et la petite tour Eiffel, au Label de la forêt.
Ici, Jérôme Attal revisite ses années estudiantines en mettant en scène Nico, son alter ego, semble-t-il. À cet âge « égoïste », (25 ans), «moment bâtard de l’existence », pas facile de concilier travail, amour, musique, vie en groupe, sorties nocturnes.
Une vie chaotique, comme « en état de survie »,« au bord du précipice ».
La tête de chou trouvée sur une tombe, lui faisant penser à Gainsbourg, (figure tutélaire pour un musicien), va lui servir de talisman, de confidente, « de mascotte » à son désarroi. Elle est une réplique en résine de la sculptrice Claude Lalanne.
Il ne la quittera plus, la trimballant dans un sac « Herschel ». Il pourra dialoguer avec elle, « sur la table des soucis, le couvert est mis pour deux ».
Lui portera-t-elle chance dans sa quête d’amour, lui permettra-t-elle de voir percer son groupe « Peggy Sage », séduira-t-elle le professeur monsieur Fabis, lors de la soutenance de son mémoire ? Mais c’est à Laura, cette fille charismatique, qui l’a chamboulé, qu’il voudrait offrir ce présent ! Leur liaison est plutôt en pointillé, Laura aime trop sa liberté. Des moments suspendus, certes, mais frustrants pour Nico qui est conscient de ces « liens lâches », guère satisfaisants, puisque pas exclusifs ! En mémoire ses « baisers voraces comme des plantes carnivores ».
Mais n’y a-t-il de vrai au monde que de déraisonner d’amour, pour Musset ?
Par alternance, on assiste aux répétitions de son groupe, à ses rencontres pleines de sensualité avec Laura, hélas éphémères. « L’amour est une obsession » pour Bacon !
On le suit dans ses errances dans les rues de Paris, sur le Pont des Arts, dans ses soirées au Bus Palladium ( dont la disparition doit raviver ses souvenirs) avant de retrouver la solitude de son appartement. On s’arrête avec lui devant la statue de Valentine Visconti dans le jardin du Luxembourg.
On le suit aussi en Normandie lors de ses vacances en famille où il fait le constat de l’érosion du sol ( affaissement, glissement de terrain). Voir les maisons vouées à « une demolitionparty » lui inspire une chanson à caractère plus universel autour de la situation de la planète, tirant la sonnette d’alarme, tels les collapsologues.
Enfin, on l’accompagne dans ses visites à son père, atteint de syllogomanie !
Ayant une formation en Histoire de l’Art, il nous offre une immersion dans l’oeuvre de Bacon, sujet de son mémoire de maîtrise pour lequel il a fait moult recherches, a échafaudé d’étranges rapprochements avec les toiles d’autres peintres!
On l’accompagne à l’expo Bacon dont il détaille les tableaux qui ont retenu son attention, les rapprochant de ceux de Van Gogh, de Gauguin dont « Le Jambon ».
Occasion de prendre en considération ce poste ingrat du personnel chargé de surveiller les tableaux, « condamné à l’immobilité d’une salle à l’autre ». Ce qui rappelle le roman de David Foenkinos «Vers la beauté » !
Il reste au lecteur à consulter le net et à s’attarder sur tous les tableaux que l’étudiant en art évoque avec beaucoup de précisions.
Lors de la soutenance, le jeune homme nous bluffe d’ailleurs par ses réparties alors que son maître pointe des failles, des oublis ( cf Soutine) !
Jérôme Attal, se complaît dans les jeux de mots. Au lieu de Francis Bacon, pourquoi pas «Francis Trout ou Francis fish », avance son professeur.
On se surprend à vouloir recopier de nombreuses tournures, si surprenantes sont-elles : «C’était une nuit sans étoiles, gonflée artificiellement à la testostérone des lampadaires. ».
Il excelle dans les descriptions d’intérieur qui reflètent la personnalité du locataire ! Pénétrer dans la chambre de son père, « c’était un peu comme entrer dans un palais byzantin, murs décorés de culs de bouteille sculptés en forme d’étoiles ou de pâquerettes. »
Cet écrivain, à la double culture franco-britannique, a pour marque de fabrique, cette façon de distiller sa «British touch » ! On prend un « English breakfast ».
Ceux qui connaissent l’auteur ne seront donc pas étonnés de voir dans le récit une pléthore de mots en italiques en anglais : crazy, what does it mean ?, It’s all about money, demolition party, running, bikers, morning glory, no bad days ( sur un mug), «black dog » , en faisant allusion à la dépression de Churchill.
Les chansons qui traversent le roman ont des titres anglais : « Wild is the wind ».
C’est un « Nico », adolescent, à multiples facettes qui se dévoile : seul, gauche quand il danse, sensible, pudique, timide pour aborder des filles, infernal selon sa soeur, une version parisienne de Peter Pan pour la mère, incorrigible dans sa propension à « mendier du temps », hésitant sur son avenir, sans réel « plan de vol ».
Amoureux fou, victime de désillusions, de déceptions, de violence, souffrant « de la pathologie du train » ! Souvent mélancolique, désemparé, découragé, abattu, en proie au chagrin, déprimé par «la connerie de certains ». Il confie avoir trouvé en Paris, le lieu parfait où « on pouvait pleurer tranquille toutes les larmes de son corps dans l’indifférence générale ». « Délicieux d’avoir Paris pour décor à l’attente ».
Son épiphanie ? Son mémoire de maîtrise validé ! Mais aussi le retour d’Inès…
Son âme de poète nous séduit quand il écrit à Laura, lorsqu’il décrit le paysage de Blonville : « Je flirtais avec les vagues, les parterres de roses trémières qui se détachaient sous la crème fouettée des nuages. », « J’apercevais un ongle de mer, une pente de toit où gambadait un écureuil roux pétrifié en épi de faîtage. »
Son imagination intarissable le conduit à inventer des objets comme « un GPS miniature à l’usage des mouches » et à prêter au père une vie riche, hors du commun, s’amusant comme un fou avec ses vidéos, habillé en spationaute « flottant dans un hyperespace… », dans lequel il se complaît. Ce qui rappelle, pour les aficionados de Jérôme Attal, les inventions du père de famille dans Les jonquilles de Green Park.
Dans ce roman d’apprentissage ponctué de confidences, on devine :
l’insatiable lecteur à travers ses multiples références littéraires ( Huguenin, Anaïs Nin, Rimbaud, Verlaine…) , faisant la part belle à la littérature et à la poésie.
le chanteur parolier nourri de chansons, ayant pour référence Dylan, Bowie et cultivant le culte Gainsbourg. « Avec les chansons, il avait trouvé un endroit à lui, une forteresse, alors que tout n’était que tourmente au-dehors ».
le connaisseur en peinture qui lit Anton Ehrenzweig, fréquente les musées.
l’auteur, lui-même convaincu par la vocation de l’art : grâce à « une toile, un roman, une chanson » nous pouvons « remonter la pente dans ce monde strié de diagonales violentes ». Un poème « comme un radeau sur une mer de souvenirs » !
Toute une érudition dont il a le talent de nous imprégner et de nous enrichir.
Dans ses échanges avec Ignacio, le fiancé de sa sœur, pointent les inquiétudes et les doutes de l’écrivain lors de la sortie d’un livre. On peut subodorer que Jérôme Attal partage cette angoisse, il a tort, il nous régale encore !
Au cours de la lecture, nous nous retrouvons otage de son récit, dans un véritable « étau d’impatience » quant au triple dénouement.
Jérôme Attal sait nous émouvoir dans ce roman intime, à la veine autobiographique, très maîtrisé dans lequel il livre ses réflexions sur le métier d’écrivain, le comparant avec celui de parolier, mais aussi sur l’amour. Un récit qui lui ressemble !Et où il a mis une nouvelle fois tout son coeur !
Dernier livre paru : Petit éloge du baiser, Les pérégrines ( 2021)
Pierre GILMAN, Où le poème, Le Taillis Pré, février 2022, 114 pages, 15€
« Des mots parfois sortent par ma fenêtre
et s’en vont s’asseoir sur un banc
de la petite place proche de ma cour.
D’autres vont se cacher dans l’herbe
au pied du mur où grimpe une passiflore,
attendant qu’une lumière imprévue les découvre.
Je les regarde souvent s’accorder entre eux,
mais jamais ne leur dis que je suis là,
même quand ils se retournent vers moi.
Ils regardent au-delà de mes yeux
comme s’ils ne me connaissaient pas.
Ils parlent mais je ne les comprends pas toujours,
tant peut-être ils ont volé ma voix » (p.16)
Sur le très officiel avis de décès de Pierre Gilman (mort, l’an dernier, à 72 ans), on lit, juste après son état-civil : Secrétaire particulier de la Confédération générale des satyres de progrès. L’humour – un peu dévastateur, car nul ne fut moins satyre ni progressiste ! – a donc survécu à la (dernière) maladie, comme la pureté de son chant survivait au désespoir – car ce qu’il avait à dire vivait plus et mieux que lui :
« Où le poème disparaît
comme les visages aimés dans la mémoire de l’aveugle.
Ce que nous avions à dire et que nous n’avons pas dit
S’abrite encore dans une blessure âpre à guérir.
Ce que nous avions à dire et que nous avons dit
Répète que le bonheur est plein de vide« . (p.11)
C’était donc (malgré deux recueils seulement publiés, ce troisième est posthume) un franc et pur poète : ce qu’il avait à dire a sans cesse travaillé en lui, voilà tout, même s’il n’a pas bien su, jusqu’au bout, distinguer ce qu’il aura pu en formuler ou non. Ce qu’on voit partout en le lisant, c’est qu’en lui, en effet – et l’âme d’un poète a cette exacte substance – les choses changeaient (s’altéraient, bougeaient, s’étendaient et se contractaient, advenaient et périssaient) exclusivementselon des mots, mots qui résonnent entre eux d’abord, selon eux plus que selon lui, et n’obéissant pas tout à fait à leur travail de commande même.
« À voix basse nous déplaçons des terres provisoires,
mais il y a tant à faire et tout se défait,
quand la feuille de papier tient encore à son silence
et que les mots restent cachés à l’envers du jour » (p.11)
L’imagination ici varie activement les apparences pour voir si une essence des choses était là, et subsiste : quoi de changé chez le riverain, si l’océan pénétrait dans sa chambre (p. 34) ? chez l’enfant sortant de contempler un tableau bleu (de Sam Francis !) si son propre petit tablier bleuissait d’autant (p.52) ? chez le même, moulant ses premières lettres, sommé par l’institutrice d’aller à la ligne, lui disant « préférer écrire sur une seule et même ligne/pour qu’elle sorte de son cahier/et, dans un petit bois, ramasse des mots/qui viendraient lui parler d’elle » (p.62) ? Toujours l’auteur expérimente des occasions rêvées, pour voir ce qu’en dit – ou même ferait ! – le monde :
« Que deviendrait la mer désertée
et les poissons se révolteraient-ils ?
Et si demain des maisons enlevaient leurs toits
pour te saluer quand tu marches,
ou que, dans une cour de récréation
le moindre mot faisait boule de neige,
le monde te réinventerait-il ? » (p.60)
Pierre Gilman avait les moyens de la liberté de ses mots : leur liberté toujours finançable d’aller et venir, toujours heureuse de se réunir, toujours légitime de s’étayer les uns les autres – liberté artisanale, aux antipodes mêmes de la latitude algorithmique de nos réseaux – qui, elle, est sans enfance, sans vide, sans distance à soi, sans usage de l’impossible, et demeurerait fermée aux consignes merveilleuses que se donnait cette conscience poétique :
« Garde du ciel pour plus tard
et éteins celui qui te rend visible.
Ne réserve pas pour ta vieillesse une lanterne,
et dépose ta lune en papier jaune sur la table.
Et par le carreau cassé de l’unique fenêtre
laisse partir tes yeux trouver un autre chemin
où vivre, aimer, rien que vivre et aimer » (p.18)
Le recueil se termine par une étonnante danse des prépositions. S’en récitant alphabétiquement la liste (à, après, avant, avec, chez, contre, dans, de, derrière … près, sans, sous, sur, vers), l’auteur les prend pour ce qu’elles sont : des mots invariables permettant à d’autres mots de se varier les uns les autres – et l’on voit alors, comme physiquement, avec ces sortes d’embrayeurs d’évocations, les compléments de présence hantant sans trêve cette inspiration (p.93-103) :
« Chez l’homme qui sait quand un arbre est malade »
« Dans la proximité du poème qui émerge quand tu n’as plus rien à lui dire »
« De l’ordre qui fut donné de séparer les étoiles pour que chacun sache laquelle brillait pour lui »
« Entre une enveloppe pleine et une autre vide dans la chambre du suicidé »
« Jusqu‘au sommet de la montagne qui a besoin de ton pas »
« Près du nomade roulé dans son épaisse laine »
« Sans qu’une roue de charrette ne s’arrête la nuit contre ta porte »
« Sous une robe que n’avertit pas le vent »
« Sur un oreiller où tu ne trouves pas ta tête de dormeur »
« Vers des seins à la puissante liqueur »
« Vers l’ordre du poète : »Ignorez-moi passionnément ! »
Cet homme, c’est vrai, n’a pas tout dit, pas même à soi (la transparence est intrusive, l’intimité sans opacité n’est qu’un leurre), mais un coeur nu et noble s’est clairement risqué hors de soi, puisque, même dans l’imaginaire, on n’accède à rien sous abri. Où le poème, donc ? Exposé entre nous ! Si les mots n’ont que nous pour faire chanter leur matière, nous n’avons qu’eux pour noter nos pensées et faire lire l’esprit à lui-même.
Dany Laferrière de l’Académie française, Sur la route avec Bashō, roman, Grasset, 2021- ( 384 pages – 22€)
Rien d’étonnant que Dany Laferrière, lui qui s’est déclaré « un écrivain japonais », nous invite à cheminer en compagnie de Bashō dont le portrait ouvre et clôt ce livre et dont il distille la poésie. Il confie avoir tissé une exceptionnelle amitié, une connivence inexplicable et lui rend hommage.
« Toute la nuit « Sous les fleurs d’un monde
sur la ronde lune avec mon riz brun
à faire le tour de l’étang » et mon saké blanc »
Bashō
Ainsi s’infiltrent les courts poèmes, haïkus qui font surgir de magnifiques images subliminales. «Pour certains , même, le menu est un poème » !
« L’homme-livre » prolifique pose les traces de ses lectures et de ses rencontres avec les vivants et les morts au fil de ses pérégrinations et distille des réflexions autour de la lecture et l’écriture. « Le papier aura toujours le dernier mot. »
S’immiscer dans le panthéon littéraire de l’Académicien est une route exaltante.
Il a baigné dans la littérature très jeune ( Rimbaud, Verlaine, Li Po…) et son érudition donne le vertige. À nous d’être curieux si nous n’avons pas lu les auteurs cités : Anaïs Nin, Simone de Beauvoir, Sylvia Plath, Jean Rhys, SandorMarai, Neruda, ou si nous ne les connaissons pas comme : LangstonHughes , ZoraNealeHurston…Et Moravia à ne pas oublier. Il cite Whiteman qui s’imagine pouvoir « vivre avec des animaux, tant ils sont paisibles » , la romancière et dramaturge Marie–VieuxChauvet, qui a dû s’exiler à New-York, en 1968, après avoir eu un de ses livresinterdit par le dictateur Duvalier.
Dans cet ouvrage, l’écrivain renoue avec l’ art graphique auquel il nous a familiarisé dans L’exil est un voyage et Autoportrait avec chat et que l’on retrouve dans une récente publication : Dans la splendeur de la nuit (1).
Toutes les formes sont représentées au gré de son inspiration : cercles, points, arcs, carrés, hachures, rayures, quadrillages, vagues, circonvolutions, triangles…Maintes silhouettes dont une récurrente qui change de couleur comme le caméléon. À chacun d’interpréter les dessins énigmatiques !
Pour voir un tableau : « on doit croire qu’il nous regarde aussi. » pense-t-il.
On croise une galerie d’écrivains de toutes nationalités joliment croqués par l’auteur ( Kawabata, Mishima, des romancières…) ou d’autres ( Cendrars par Modigliani, Radiguet par Cocteau) et au détour d’une page deux sportifs dont Nadar et Federer et des championnes de nage synchronisée.
La mode s’invite aussi avec les chapeaux Lindbergh.
En ce qui concerne les arts, on peut admirer l’exposition Basquiat « Peintures accrocheuses qui vous sucent la rétine », du Matisse, du Picasso, un tableau de Soulages. Les formes cabalistiques de l’art vaudou, appelées vévé, sont représentées dont la divinité Legba qui est gravée sur l’épée de l’Académicien.
On perçoit la musique de Nina Simone, de Manu Dibamgo, Glen Milller, Ellington, des airs de jazz, de Coltrane…
Dany Laferrière livre son autoportrait en 3 volets et confie ses souvenirs .
Il évoque le grenier de son enfance , son adolescence à Port- au -Prince « l’époque où l’on est ni fille ni garçon juste un jeune animal ».
Il se remémore un film vu à 15 ans, les couchers de soleil de sa jeunesse à Haïti.
On devine « l’écrivain en pyjama » quand il dévoile sa table de travail où il a rédigé une ébauche de texte « à la lisière du sommeil », à revoir le lendemain.
Il affiche ses convictions en rappelant le slogan scandé lors des émeutes raciales: « Black lives matter » ou en représentant les manifestants à Portland ( contre les policiers bien armés) en juillet 2020 ou ceux sous la pluie à Hong kong.
Il pointe les drames qui se passent sous nos yeux et s’interroge : « Se sent-on complice » ?
Il aborde les notions de liberté , insérant la lettre de l’esclave Toussaint Louverture et la question de la fuite du temps, conseillant de ne pas regarder son visage dans le miroir !
L’écrivain voyageur traduit dans de nombreuses langues, qui a écumé le monde nous fait visiter des pays, ( Corée du Sud, Japon ) des villes: Paris, New York, Montréal, Beyrouth, Budapest, Pékin où réside son éditrice chinoise.
Parmi ses lieux de prédilection, on retrouve son goût :
pour les cafés : ce qui rappelle son opus « L’odeur du café ». Dans un café de Moscou une femme en rose lit Pouchkine. Au Red café, pas encore de clients.
pour les fenêtres d’où l’on peut saisir « la rumeur du monde », d’où le mauvais élève peut s’échapper pour ne pas finir ses devoirs, d’où l’on peut contempler le soir « le soleil tituber dans le golfe »
pour les chambres : « port d’arrivée le seul pays que l’on peut connaître à fond », où l’on pose sa valise, « où le drap blanc bien tiré sent la lavande », où « Le voyageur revient un jour ou l’autre.. », où on dessine, où une amoureuse attend le facteur, où l’on tourne, se fait des films. « Ailleurs dans la pénombre d’une chambre, le hibou attend la prochaine nuit ». (1)
pour une maison romaine , source d’inspiration pour écrire une nouvelle à la façon de Tchekhov !
L’amour des fleurs se traduit par des compositions florales aux couleurs variées (en vert, rose, orange, violet), bouquet de tulipes, parc…
Les paysages de nature contrastent avec la représentation des villes : une forêt touffue où se niche la maison de Camera, des feuillages, des frondaisons qui assurent l’apaisement lors de la promenade du soir, une prairie vierge.
Vivre parmi les animaux, au coeur de la forêt, loin de « ce monde sans pitié », c’est le choix d’un couple d’aubergistes du Québec pour satisfaire son appétit de nature.
Même si une machine à écrire (jaune) figure dans ce livre, précisons que celui-ci est entièrement MANUSCRIT et illustré par Dany Laferrière. Ce qui force l’admiration.
Le mot vibrer est une façon de rappeler qu’il a vécu un séisme apocalyptique à Haïti, si bien que les moindres vibrations et les fleurs qui dansent peuvent faire craindre le pire. De même les cyclones sur ces îles sont dévastateurs.
Sachez que les questions sur son parcours l’ insupportent vous trouverez les réponses dans L’exil est un voyage.
« On ne peut pas trop vivre avec le coeur dans un pays et la tête dans l’autre »
Laissez-vous embarquer à la rencontre de cet aréopage éclectique, dans ce roman richement coloré où se côtoient de nombreux dessins , jalonné de textes, poèmes , haïkus, ce qui confère à ce livre son caractère singulier et sa dimension séduisante. Périple déroutant et enrichissant pour le lecteur, qui recèle des surprises.
Comme l’affirme Alain Mabanckou :
« La poésie de Dany Laferrière exalte le goût du voyage » ! (1)
Ainsi parlait MAETERLINCK (1862-1949)- Dits et maximes de vie choisis et présentés par Yves NAMUR – Arfuyen, septembre 2021,176 pages,14 €
« Il n’y a pas de cause première. Il y a la cause circulaire où le commencement qui n’existe pas, rejoint la fin qui est impossible » (§ 301)
Les philosophes pensent, on le sait, par concepts (qui leur permettent de se représenter les groupes d’êtres ou d’objets par l’entre-relation logique de leurs propriétés), mais ce qui permet, mystérieusement mais manifestement, à ce poète de philosopher sans concepts instruit et ravit. D’abord parce qu’un lien se fait toujours chez lui entre mise en images et constante activité :
« Agir, c’est penser plus vite et complètement que la pensée ne peut le faire. Agir, ce n’est plus penser avec le cerveau seul, c’est faire penser tout l’être. Agir, c’est fermer dans le rêve, pour ouvrir dans la réalité, les sources les plus profondes de la pensée » (§ 169)
Ensuite parce que pour lui l’existence décide des notions, non l’inverse : « vie » et « mort » sont par exemple ce qu’en font vivants et morts, et Maeterlinck devine extraordinairement (dans une espèce de psychologie médiumnique et prosaïque !) leurs secrets ressorts d’être :
« Les hommes ne disent la vérité qu’aux morts parce qu’ils croient qu’ils la savent déjà, parce qu’ils sont convaincus qu’ils voient tout et qu’il est inutile de leur mentir; sinon ils les tromperaient aussi naturellement qu’ils trompent les vivants » (§ 343)
« C’est en naissant que nous mourons, puisque nous échangeons une vie éternelle et universelle contre une mort passagère et individuelle. N’est-ce pas jouer à qui gagne perd ? » (§ 439)
« Je n’ai jamais rencontré un mort mécontent, agressif ou revendicateur, menaçant ou tragique. On dirait que le trépas ne laisse vivre que la bonté des hommes. Peut-être sont-ils las d’avoir vécu. C’est après la mort qu’on doit sentir tout le poids de la vie » (§ 444)
Maurice_de_Maeterlinck.jpg: Tucker Collectionderivative work: Electron, Public domain, via Wikimedia Commons
Enfin l’on pense avec des mots, mais non les mots avec lesquels nous retissons abstraitement la présence, mais ceux avec lesquels nous comprenons notre passé, les mots qui concrétisent notre propre continuité et se font d’elle l’hôte compréhensif !
« Surtout n’envions le passé d’aucun homme. Notre passé fut créé par nous-mêmes, pour nous seuls. Il est le seul qui nous convienne; le seul qui ait à nous apprendre une vérité que personne n’eût pu nous apprendre, le seul qui nous donne une force que personne ne nous puisse donner. (…) Il n’y a point de passé vide ou pauvre, il n’y a que des événements misérables, il n’y a que des événements misérablement accueillis » (§ 238 et 240)
Le premier devoir de penser est donc, pour ce poète, de vouloir passer, et de voir (et concevoir) passer ce qui est :
« Tout le malheur de l’homme vient de ce qu’il ne veut pas comprendre qu’il n’est qu’un passant. Il ne renoncera jamais au rêve irréalisable d’être un passant qui ne passerait pas » (§ 379)
« Il est puéril de se demander où vont les choses et les mondes. Ils ne vont nulle part et ils sont arrivés » (§ 273)
Un amoureux de la nature souhaite que la réalité reste naturelle, mais la préoccupation de la nature même est de rester réelle : ne pouvant obtenir que d’elle-même ses propres états, elle doit sans cesse relancer son propre pouvoir d’accomplissement, produire sa propre actualité. C’est par exemple vrai de toutes les communautés d’insectes, où l’incessante capacité d’avenir d’une vie collective prime. Mais Maeterlinck semble l’étendre à tout système naturel : l’intelligence de sa constante réactualisation est son exercice nécessaire, et son effort suffisant. La perfection y serait diversion, impasse, irrésilience, stratégie exactement contre-reproductive :
« On dirait que la nature ne sait pas ce qu’elle veut, ou plutôt, ne fait pas ce qu’elle veut, que quelqu’un lui retient le bras pour l’empêcher de trop bien faire » (§ 283), car « le désir du parfait n’est peut-être qu’une des plus misérables infirmités de notre cerveau » (§ 312)
Ce dynamisme vital (prendre conscience à temps, et viser ce qui se révèle advenir) est d’ailleurs fondamentalement pessimiste, car il implique que la nature ne garde d’elle-même que ce qui lui permet de devenir autre, elle ne conserve que ce qui la transforme en ses états suivants. Sa constante imagination du réel d’après vaut stricte amnésie du meilleur :
« Ce que nous avons le plus de mal à admettre, c’est qu’il ne se forme pas dans l’espace ou dans le temps, une sorte de réserve où s’accumuleraient les fruits de toutes ces expériences, de tous ces efforts, de toutes ces luttes contre le mal, la misère, la souffrance, l’imbécilité, la matière; qu’un jour tout sera perdu, tout sera à recommencer comme si rien n’avait été fait et que si le pire aggrave les maux et nuit à tout le monde, le meilleur ne modifie rien et ne profite à personne » (§ 285)
Surtout que tout horizon est fini, puisque la mort (sans perte pour elle !!!) nous en barre irrémédiablement l’accès :
« Vivre, c’est perdre le temps que l’on doit à la mort. Mais la mort étant éternelle n’y perd rien » (§ 315)
Mais il y a bonheur à le comprendre, puisque de toute façon « on n’a que le bonheur qu’on peut comprendre » (§ 113), et que « Il y a bien plus de terres inconnues dans le bonheur qu’il y en a dans le malheur. Le malheur a toujours la même voix, mais le bonheur fait moins de bruit à mesure qu’il devient plus profond » (§ 114). Le bonheur est comme la joie de pouvoir vivre se contentant d’elle-même, et s’élevant à savoir être sa propre suffisante bonne heure :
« Vous ne pouvez vous dire heureux que lorsque le bonheur vous a aidé à gravir des hauteurs d’où vous pouvez le perdre de vue, sans perdre en même temps votre désir de vivre » (§ 116).
C’est pourquoi « notre bonheur nous juge » (§ 139), y compris celui des autres :
« Il faut être heureux pour rendre heureux; et il faut rendre heureux pour demeurer heureux » (§ 119)
Bonheur de comprendre, mais sans orgueil de penser. La fraternité de Maeterlinck avec les irréfléchis ( qui « ne jouissent de la vie qu’en oubliant qu’ils vivent » § 325), et les médiocres ( qui ne font jamais « monter la vie universelle à la surface de leur conscience » §329) est totale, et constante : la tâche réelle de l’esprit (non pas du tout agrandir ce qu’on admire, mais « éclaircir ce qu’on n’aime pas » § 148) est épuisante, ingrate et facilement arrogante – sa tentation est de rêver une vie meilleure que l’ordinaire en oubliant ou trahissant (§ 153) les conditions ordinaires de la vie et « la simplicité de l’existence la plus normale » (§ 158). La vie réelle est jeune, opaque et laborieuse, et, pour Maeterlinck, la rêvasserie planquée et satisfaite du pur intellectuel n’est qu’un lâche contresens. C’est écrit sans ménagement, y compris pour lui-même !
« Hélas! Rien n’est fait, tant qu’on n’a pas appris à endurcir ses mains, tant qu’on n’a pas appris à transformer l’or et l’argent de ses pensées en une clef qui n’ouvre plus la porte d’ivoire de nos songes, mais la porte même de notre maison … » (§ 191)
« Si déjà le sang coule sous la porte permise, quelle est l’horreur qui veille sur le seuil interdit ? » (§ 215)
« Il est bon que dans les misères humaines, le plus vieux prenne sur ses épaules tout ce qu’il peut porter; puisqu’il n’a plus que quelques pas à faire pour qu’on le soulage du fardeau… » (§ 252)
Le goût de la vérité est ainsi franc, sans confort et exclusif : la vie même de la vérité doit faire éclater la cohérence (« Qui n’ose se contredire n’a jamais fait le tour d’une idée » § 395). Il n’y a pas d’amour malheureux de la vérité (« Une vérité, si décourageante qu’elle paraisse, transforme le courage de ceux qui savent l’accepter » (§ 135) , et toute désillusion, bien conduite, a quelque chose de sacré, qui seule fait du penseur un sage :
« L’intelligence et la volonté, comme des soldats victorieux, doivent s’habituer à vivre aux dépens de tout ce qui leur fait la guerre. Elles doivent apprendre à se nourrir de l’inconnu qui les domine » (§ 105)
« Le penseur ouvre la route « qui va de ce qu’on voit à ce qu’on ne voit pas », mais le sage ouvre la voie qui mène de ce qu’on aime à ce qu’on aimera, et les sentiers qui montent de ce qui ne nous console plus à ce qui peut nous consoler longtemps encore » (§ 118)
Ce poète, qui a, si fortement et finement, la tête métaphysique, suspecte pourtant, comme avisé lecteur de Kant, le vent des usuelles idées métaphysiques : libre-arbitre, absolu, Dieu, ou même (contrairement à Kant alors) la sainteté morale …
« De même qu’une bulle de savon ou un astre ne peut subsister un instant dans le vide, de même la liberté humaine ne peut se maintenir que sous la pression de toutes les volontés qui l’entourent et entre lesquelles elle a d’autant moins le choix qu’elle ne les connaît point » (§ 322)
« La pensée de l’inconnaissable et de l’infini ne devient vraiment salutaire que lorsqu’elle est la récompense inattendue de l’esprit qui s’est donné loyalement et sans réserve à l’étude du connaissable et du fini » (§ 231)
« Dès que notre intelligence sommeille un instant, nous créons un Dieu; mais ce Dieu n’est pas digne de nous » (§ 320)
« Une vertu maladive est souvent plus funeste qu’un vice bien portant; en tout cas, elle s’éloigne davantage de la vérité, et il n’y a rien à espérer loin de la vérité » (§ 196)
On ne peut qu’être sincèrement reconnaissant du travail de féconde collecte et de présentation rigoureuse de cette oeuvre, fourni par Yves Namur, lui-même grand poète. Sa suggestive préface sait nous faire rencontrer Maeterlinck avec les yeux mêmes des plus grands – Rilke, Pessoa, Artaud, Cocteau (« Jamais ange ne sut mieux se travestir pour évoluer parmi les hommes que sous une apparence de businessman robuste et sportif » …), Jules Renard, Jean Rostand, qui l’aimèrent – et nous présenter cet auteur fascinant de virtuosité et de justesse. On ne peut qu’admirer un auteur qui est l’ami du meilleur de chacun; du meilleur seulement, il est vrai – mais en une si profonde (et énigmatique !) droiture :
« En attendant, il n’y a qu’à continuer de vivre afin de voir ce que la vie finira par donner. Du reste, elle a déjà donné tout ce qu’elle donnera; mais nous l’ignorons encore. Elle a l’éternité pour nous l’apprendre, mais l’homme n’a pas encore eu le temps de l’écouter » (§ 391)
Chantal Couliou, vous êtes publiée par plusieurs maisons d’édition, Le Dé bleu, Rafaël de Surtis, La Porte, La lune bleue, Soc et Foc, Voix tissées, Gros textes, Unicité, Encres vives, les éditions du Petit Pois, les éditions Sauvage. Et dans plusieurs anthologies.
L’ouvrage-somme Femmes de lettres en Bretagne* vous présente parmi « les poétesses à lire et à découvrir » et précise que vous avez publié une trentaine de recueils, dont des haïkus. Depuis quand écrivez-vous ? Et quelle nécessité vous a poussée à publier ?
* Editions Goater, 2021. Matrimoine littéraire et itinéraires de lecture, du Moyen-Âge à nos jours, Gaëlle Pairel,Jean-Marie Goater, Geneviève Roy, Claude Thomas.
Chantal Couliou
J’ai envie de vous répondre depuis toujours mais plus sérieusement à l’adolescence. Des poèmes de révolte. C’était une manière de dire un mal-être comme beaucoup de jeunes en général à cette période de la vie.
Une fois écrits, les poèmes ont besoin de prendre l’air, de vivre l’épreuve de la lecture par d’autres. La poésie se partage. La publication permet aussi la rencontre avec des plasticiens et des photographes. Je voudrais ici remercier les revues qui ont publié mes premiers poèmes : Lieux d’être, Les Cahiers Froissart, Friches, Spered Gouez/l’esprit sauvage… et mes premiers éditeurs Michel Cosem et Jacques Fournier.
Marie-Hélène Prouteau
Vos poèmes évoquent souvent la nature. Les titres des recueils sont très significatifs, Au creux des îles, De l’algue à la pierre, Dans les coulisses du jardin, Du soleil plein les yeux. Quelle place la nature et la mer, en particulier, ont-elle dans votre inspiration ?
Chantal Couliou
Je vis au bord de la mer. L’océan ne peut pas nous laisser indifférent. Tantôt apaisé, tantôt en furie. Observer et écouter les mouettes, les goélands mais aussi les passereaux, le rouge-gorge, une mésange qui se nourrit de graisse en hiver sur le rebord d’une fenêtre, le coucou annonciateur du printemps, le hululement de la chouette au cœur de la nuit. L’arrivée des primevères sur les talus ne cesse de m’émerveiller et ce depuis mon enfance. Je ne m’en lasse pas. Nous vivons avec la nature que nous malmenons alors qu’elle est pour nous source de sérénité. Le défilé des saisons dans les arbres m’accompagne. Il suffit de me pencher à la fenêtre pour les retrouver
Le soleil, la pluie, le vent influent sur notre présence au monde, modèlent nos sensations, nos émotions. Le vent nous ramène à notre fragile condition d’homme face à la force des éléments. Les tempêtes, les cyclones, sont là pour nous le rappeler. Impossible de lutter contre.
Marie-Hélène Prouteau
Vous reprenez à votre compte la belle formule d’Abdellatif Laâbi, le grand poète marocain dont le nom, la vie et les poèmes incarnent un idéal d’humanisme et de justice : » De l’homme à son humanité la poésie est le chemin le plus court le plus sûr ». Pouvez-vous nous dire comment cette dimension traverse vos propres poèmes ?
Chantal Couliou
Celui qui lit, qui écrit de la poésie montre une part d’attention à l’autre, aux autres. Il tente de comprendre un univers, le sien et ceux plus lointains. La poésie console. La poésie nous permet de regarder au-delà de nous-mêmes. Elle est une présence au monde, le contraire de l’indifférence. Je suis poreuse à ce qui se passe à l’autre bout de la planète ou tout près de moi. Je suis poreuse à la vie de l’autre, à ce qui peut le blesser, le rendre heureux et c’est cela qui crée le besoin de dire, d’écrire. La poésie est bonheur, malheur, échecs, joies, réussites, … J’écris à partir de mes émotions, de ce que je ressens.
Marie-Hélène Prouteau
L’on est frappé à vous lire par la dimension lyrique de votre univers poétique. D’un côté, une poésie du quotidien, simple, évoquant soit votre vécu d’enseignante, ou la petite maison en granit, ou ces souvenirs d’une grand-mère dans Le temps en miettes, éditions Soc et Foc :
« Toujours assise au même endroit les mains croisées sur ses genoux, elle voyage sur l’un de ces cargos béats d’exotisme. Sur ses épaules le murmure des années et dans ses yeux le regard d’un ancêtre chinois »
Mais pointe aussi cette curiosité pour souci l’ailleurs avec l’Île de Pâques dans Rapa Nui. Et le souci du monde qui souvent tourne mal : « Attentat à New-York / rapt de jeunes filles au Nigéria », écrivez-vous. Y a -t-il une double tonalité dans votre écriture ?
Chantal Couliou
Double tonalité oui parce que je vis ici et maintenant mais que je connais d’autres ailleurs et ces ailleurs sont ancrés en moi. Le poète voyage sur des chemins de traverse. Il découvre et partage de nouvelles terres lointaines. Lire et écrire permettent d’enrichir le regard sur le monde, éveillent notre curiosité, nous incitent à la remise en question, au doute.
La Bretagne, terre de légendes, les grands explorateurs partis de Brest, l’océan, la poésie me poussent à regarder plus loin, de l’autre côté du monde.
Marie-Hélène Prouteau
Vous mettez ces mots de Charles Juliet en exergue de votre recueil Une traversée de soi, éditions Sauvages : » Ecrire pour repousser mes limites, agrandir mon espace intérieur, me rendre plus libre ». Pouvez-vous nous éclairer ? En quoi vous retrouvez-vous dans ce propos ?
Chantal Couliou
Ce recueil a été écrit durant ces deux dernières années de Covid, avec des périodes de confinement plus ou moins longues. L’écriture m’a permis de passer au-delà de cet enfermement forcé et de la vie sociale mise en berne. Elle m’a permis de ne pas me recroqueviller sur moi-même. Tout en écrivant, je lisais ou tout en lisant, j’écrivais pour m’offrir et m’ouvrir à d’autres horizons, d’autres espaces. En dehors de ce recueil, l’écriture me permet de dire ce qui m’anime, me fait vibrer ou bien m’attriste. Comme si je déposais un fardeau pour pouvoir aller plus loin.
Marie-Hélène Prouteau
Vous reprenez à votre compte ce propos de Joël Vernet pour dire votre venue à l’écriture : » Lire à en devenir fou. Ecrire alors pour contrer cette folie de la lecture. Terre immense des livres. Plusieurs vies nous seraient nécessaires pour accomplir ce long voyage. ». Pouvez-vous évoquer ces poètes qui vous ont accompagnée et quel apport vous avez trouvé chez eux ?
Chantal Couliou
Un partage. Je me sens moins seule pour affronter la vie. Je retrouve chez d’autres ce qui me met en joie, ce qui me chagrine, ce qui me permet de comprendre la vie, le monde. Depuis toute petite je suis passionnée par les livres, la lecture.
Quant aux poètes que j’aime côtoyer, ils sont nombreux. Je lis mes contemporains. J’essaie de me faufiler dans des univers, des écritures différentes pour élargir mon propos, pour en quelque sorte agrandir mon écriture. C’est un travail sans fin, le poème remis sur l’établi tous les jours.
Comme le dit si bien Colette Nys-Mazure « Lire m’entraîne dehors comme dedans ».
J’aime Guillevic pour sa brièveté, ses poèmes ciselés. Xavier Grall pour ses poèmes inspirés du terroir breton, de la rudesse de la vie en Bretagne à son époque, François de Cornière pour sa poésie du quotidien, Antoine Emaz pour sa concision ; j’apprécie aussi beaucoup ses écrits en prose : Cuisine, Flaques, Planche, Cambouis, Lichen encore,… J’ai le sentiment de partager la vie avec ces poètes tels Joël Vernet, Charles Juliet. Ils disent quelque chose de mes émotions, sensations dans leurs mots. Ils me permettent de savoir que je ne suis pas toute seule. Leur poésie résonne en moi.
Marie-Hélène Prouteau
Vous avez réalisé des livres d’artistes, avec Lydia Padellec, elle-même poète et fondatrice des éditions La lune bleue. Et Marie Desmée, plasticienne et poète. Vous aimez la peinture et vous avez écrit sur la photographie l’ouvrage Saint Denis, fenêtres ouvertes, éditions PSD. En quoi ces expériences au-delà des mots vous attirent-elles ?
Chantal Couliou
J’aime écrire avec des artistes, des photographes parce que cela me permet d’entrer dans un nouvel univers, rencontrer quelque chose de nouveau. Concernant l’ouvrage sur Saint Denis, c’était une très belle aventure que celle d’écrire à partir de photos sur le vieux Saint Denis. Je devais imaginer cette ville, non pas telle que je la connaissais mais comme elle avait pu être autrefois. Cet album s’est construit avec un historien–photographe Pierre Douzenel qui m’a raconté sa ville. J’ai découvert des tas de choses passionnantes non seulement sur l’histoire mais aussi sur l’architecture, la vie quotidienne, la vie politique,…
Ecrire sur une œuvre d’art permet de prendre de la hauteur, du recul par rapport à son écriture car souvent les mêmes thèmes sont à l’œuvre dans mes poèmes et vous les avez notés plus haut. Le partenariat avec d’autres arts oblige à sortir de sa zone de confort. Ecrire à partir de photos, de peintures, d’œuvre d’art permet de se mettre hors de soi, de se mettre à la place de l’autre d’une certaine façon, permet de s’approprier une autre forme de pensée.
Travailler par exemple avec la plasticienne Choupie Moysan est une aventure qui se poursuit à la fois du côté de l’illustration, de l’édition (CMJN) puisqu’elle a permis l’édition de Grand Large avec les illustrations de MargueriteRoland (encres et pastel) et de l’écriture puisque nous avons écrit ensemble Sens dessus dessous et Du bleu en tête. D’autres projets sont en cours avec une troisième complice d’écriture, Régine Bobée ( co-auteur aussi des deux livres cités précédemment).
À quatre reprises, j’ai travaillé avec Evelyne Bouvier. Ses aquarelles sont magnifiques et s’allient parfaitement avec mes écrits. Elles résonnent en moi.
Marie-Hélène Prouteau
Vous vous êtes tournée vers le haïku, en particulier avec Du soleil plein les yeux éditions Uniciét..En quoi la forme épurée, la soudaineté de cette forme poétique correspondent-elles à votre sensibilité ?
Chantal Couliou
J’ai découvert le haiku en 1995 sous la houlette de Jean-Hugues Malineau. La lecture dans la foulée de A Kyoto rêvant de Kyoto de Basho aux éditions Moudarren et celle de Fourmis sansombre confirma ma passion pour ces petits poèmes. Depuis, le haïku est devenu un fidèle compagnon. Membre de l’Association Francophone de Haïku et fidèle de Gong dès ses premiers pas. Le haïku est pour moi un bol de légèreté, un zeste de fraîcheur, une pincée d’impertinence, une multitude de clins d’œil et plein d’autres choses encore.
J’ai commencé par lire les « classiques » Basho, Buson, Shiki, Issa… Au moment de cette rencontre, j’étais une jeune maman qui devait mener plusieurs « tâches » de front et qui avait peu de temps devant elle. Le haiku m’a peut-être, dans un premier temps, captée pour cela ? Captée aussi parce qu’il permet de dire les choses simples du moment telle la photographie d’un instant. Il permet d’être plus présent au monde, à ce qui nous entoure, à cet oiseau qui prend son envol, à cette mouche qui nous embête, à cet autre qui nous interpelle.
Le goéland/sur le parcmètre/à quel tarif ?
À table/la mouche/et moi
Ce dimanche/ croisé mon ex/vide-grenier
Il nous permet d’être moins indifférent au monde dans lequel nous vivons. Il nous pousse à l’observation pertinente. Le haiku contrairement à ce que l’on pourrait penser, du fait de sa longueur, est quelque chose de difficile à écrire. Il faut le raboter, le limer, enlever toutes les scories pour n’en garder que l’essentiel.
Marie-Hélène Prouteau
Vous écrivez aussi des nouvelles publiées aux Découvertes de La Luciole, Unicité et en revues… Et des textes pour la jeunesse. À quoi répondent chez vous ces formes différentes d’écriture ?
Chantal Couliou
Cela dépend des périodes de ma vie et du temps dont je dispose. L’écriture jeunesse est (était) en lien avec mon métier d’enseignante.
Quant à la nouvelle, elle se fait urgente lorsqu’un développement plus long s’impose. Chaque forme littéraire a quelque chose de différent à dire. L’écriture d’un haiku ou d’une nouvelle, ne relève pas du même ressort. Cela ne fait pas appel au même besoin, aux mêmes exigences. La nouvelle est une écriture qui exige du temps, du travail.
Marie-Hélène Prouteau
Votre dernier recueil est publié aux éditions Sauvages crées par Marie-Josée Christien et poète elle-même et animatrice de la revue Spered Gouez. Pouvez-vous nous parler de ce recueil qui vous a valu le prix Paul Quéré ?
Chantal Couliou
L’édition du recueil est la récompense du prix Paul Quéré, prix qui est en lien avec ma démarche poétique. Une traversée de soi a été écrit durant ces deux années de pandémie. De derrière mes fenêtres, j’ai pu observer le monde proche, la mer, la neige sur la ville enrobée de silence, la vie, même réduite, qui surgissait ici et là dans le chant d’une corneille, les criailleries des goélands, la visite quotidienne d’un rouge gorge. Malgré les aléas de cette épidémie, je guettais la lumière, la lueur d’espoir, le rayon de soleil. Cette période nous a montré notre vulnérabilité, notre humble place dans un monde qui nous dépasse, dans un monde plus grand que nous et qui peut bouleverser nos vies du jour au lendemain sans que nous en ayons vraiment idée. L’espoir du mieux était toujours là, tapi dans un coin de mon cerveau. Espoir qui permet d’avancer chaque jour. La lecture m’accompagnait durant cette résidence à domicile forcée. Je n’étais pas toute seule. L’important dans tout cela étant d’être vivant et de profiter de chaque instant. En même temps que cette traversée d’épidémie, les années passent et le corps se fait moins souple, plus douloureux. Le temps m’est de plus en plus compté. Autant de raisons pour ne pas s’enfermer dans la jérémiade et garder un œil émerveillé sur ce qui fait notre quotidien, notre vie.
Chantal Couliou, Le temps en miettes, éditions Soc et Foc, 2017
Après une saison
d’encre et d’insomnie
ses mains se dénouent,
et fil à fil,
elle tricote
une écharpe de petits riens
qui l’aide
à passer le gué du désespoir.
Ses mains tirent à nouveau
sur les ficelles du cerf-volant
brodé de bonheur.
* * *
Le poids du vent
– si lourd –
sur nos fragiles épaules.
A l’heure du doute,
où sont nos enfants ?
Les chemins se resserrent
le combat se termine,
le temps suspendu
à ton souffle si ténu.
Et pourtant, à l’aube
un nouvel espoir
qui déclinera avec le jour.
* * *
Il est dit,
de bouche à oreille,
que la vie
n’est pas éternelle
et qu’un jour,
il faut se résigner
à tout quitter.
Chantal Couliou, Sur les ailes du poème, éditions Voix Tissées, collection AAA, 2019
D’un bout à l’autre du chemin
sauter
de caillou en caillou
pour éviter les trous d’eau
et dans le secret
des chemins creux
écouter le concert des oiseaux
puis s’incliner
devant le jour
qui se teinte de légèreté.
* * *
Il faudrait demander
un sursis au vent
pour qu’il nous laisse tranquille
un petit moment,
pour qu’il arrête de nous vriller les oreilles,
pour qu’il cesse de nous harceler.
Il finit par épuiser
notre patience.
* * *
Qu’a-t-il ce matin
le corbeau
perché
sur le toit du préau
comme un dieu noir ?
Il ne cesse de croasser
d’un ton vindicatif.
Chantal Couliou, Dans les coulisses du jardin, éditions Voix Tissées, Collection AAA, 2020
Sur les cheveux
de papy,
un jour d’hiver
la neige s’est posée
et y est restée.
* * *
Le jardin est à l’abandon,
le jardinier s’en est allé. Il a tiré sa révérence
par un beau soir d’été.
* * *
Cette année
les oiseaux du printemps
ne chantent pas.
Merles et grives,
mésanges et pinsons,
d’un commun accord
se sont tus
comme pour accompagner
le jardin
dans sa tristesse.
Chantal Couliou, Macules, livre d’artiste avec FIL, Atelier Miennée, 2019
Pelure après pelure,
les tenailles du temps,
les mâchoires du vide
se resserrent autour de tes bras
et te retiennent.
Impossible
de faire un pas de plus.
* * *
La peau étirée,
écartelée
entre l’ombre et la lumière. De chaque côté,
un océan de glaise
et les débris de
la mémoire inscrite
dans la terre
des ancêtres.
* * *
Une femme
aux multiples vies
se réfugie dans le silence
des couleurs. Le vent ne peut décoiffer
ses cheveux tissés
à la perfection.
Elle restera une inconnue.
Chantal Couliou, Du soleil plein les yeux, ( haïkus) éditions Unicité, 2020
À perte de vue
une marée jaune –
champs de colza
Une tache rouge vermeil
dans le cerisier en fleurs –
un pull oublié
Derrière la fenêtre
le cerisier en bourgeons –
neige d’avril
Au fond de la rade
des bateaux en fin de vie
sans fleur ni couronne
Brouillard sur le cimetière
toutes les tombes à égalité –
dans le flou
Face à l’océan
ne pas perdre son chapeau –
un bras de fer
Tempête en mer
pas de courrier pour les îliens
l’île encore plus seule
Nouvelle : Le pull orphelin,
nouvelle de la semaine sur le site de la revue Saint Ambroise du 22 au 29 juin 2020
Le pull orphelin
Ils se sont donné rendez-vous sur l’aire d’autoroute de Villiers. Pas très romantique mais rapide et efficace. Jenny déteste ces endroits mais force est de constater qu’on y trouve à peu près tout ce dont on a besoin quand on mène leur style de vie. On gagne surtout beaucoup de temps. Les heures sont comptées. Pas d’arrêt intempestif. On peut tout y faire ou presque, la pause pipi, la pause bouffe, …. Ils ont choisi cette aire là parce que c’est une des aires les plus boisées qu’ils connaissent. Les arbres sont importants pour eux. Pouvoir piquer un petit roupillon sous l’un d’eux caressé par une brise légère, ça n’a pas d’égal. Parfois ils jouent même les touristes en s’installant à une des tables de pique-nique, les jours de beau temps et plutôt en été. Ils aiment bien cet endroit parce qu’on peut y faire aussi un peu de sport, se dérouiller les muscles, se dégourdir les jambes. Et dans leur cas, c’est une nécessité. S’étirer au maximum, s’assouplir,…avant de reprendre la route.
Les néons clignotent à la boutique de la station. Il y a un va-et-vient entre les toilettes d’où provient une forte odeur d’urine, et le bar où se boivent quelques expressos aussitôt éliminés. Jenny et Claudio s’installent dans le coin le plus éloigné. Ils ne se sont pas vus depuis deux longs mois. Ils ont pas mal de choses à se raconter. Puis ils décident d’aller déjeuner au snack. Certes ce n’est pas de la haute gastronomie mais cela permet de manger chaud et pour pas trop cher. Leur temps est minuté. L’un doit remonter sur Paris et l’autre descendre vers l’Espagne. Au moins Claudio y retrouvera le soleil. Il en a marre de la pluie incessante qui rend ces journées pénibles, fatigantes et même dangereuses avec toujours en tête des objectifs à respecter. Jenny est plus cool. Elle lui parle du dernier Alain Souchon Ame fifties qu’elle se passe en boucle à longueur de voyages. Elle a tous les CD de Souchon et ne s’en lasse jamais. Une pointe de légèreté et de tendresse jalonne ces longues journées de travail.
Jenny et Claudio ont l’habitude de se retrouver sur les aires d’autoroute pour se raconter des morceaux de leurs vies respectives. Ils se sont connus lors d’une halte sur l’aire du Rossignol.
Cette fois- là, ils descendaient tous les deux vers Marseille et on peut dire qu’ils avaient fait le voyage ensemble.
Quelques mois plus tard, Jenny attend Claudio sur l’aire d’autoroute de Villiers depuis une bonne heure déjà. Elle est très inquiète car Claudio n’est pas au rendez-vous. Ce qui n’est pas dans ses habitudes. Il est ponctuel et déteste être en retard. A-t-il eu un problème?
Des gangs organisés venus de l’Europe de l’Est leur mènent la vie dure. Ils doivent être sans cesse vigilants et ne pas relâcher leur attention car en un rien de temps leurs précieuses cargaisons peuvent mystérieusement s’envoler. C’est ce qui est arrivé, ici même, l’été dernier à Fabrice. Jenny décide d’attendre Claudio au chaud. Il saura bien la retrouver. Elle ne quittera pas les lieux avant d’avoir de ses nouvelles. Son portable reste muet. Bizarre, Claudio ne l’a pas prévenue de son retard. Quand elle essaie de le joindre, il est sur messagerie. Sa voix la rassure un peu mais pas longtemps. Elle ne se sent pas très bien. Nauséeuse. Mal de tête. Le stress et l’angoisse enflent.
A la télé qui fonctionne ici à longueur de journée, un flash info spécial trafic. Il vient de se produire un terrible accident sur l’autoroute en Espagne, non loin de Barcelone. D’autant plus grave qu’on est en pleine période de transhumance et que les automobilistes sont nombreux sur la route des vacances. Un gigantesque carambolage. Un camion- citerne a explosé et a entraîné l’embrasement de plusieurs véhicules. Arrivés très rapidement sur les lieux du drame, les pompiers ont tout fait pour maîtriser le feu le plus vite possible. L’incendie risquant de se propager dans les champs alentour où tout est très sec. Il n’a pas plu ici depuis deux mois. Jenny reste scotchée à l’écran. Elle le dévisage, essayant de comprendre. Elle appelle immédiatement Fabrice qui ne peut lui en dire plus. Lui est en Allemagne. Alors Jenny décide de téléphoner à Marina la compagne de Claudio. Le répondeur aussi. Elle en passe des coups de fil mais personne ne peut lui donner de nouvelles. Jenny décide de reprendre la route devant être à 20H00 à Paris. Elle aura beaucoup de retard mais qu’est le retard face à cette rencontre manquée. Jenny voulait inviter Claudio et Marina à son mariage. La jeune femme a décidé de changer complètement de vie à la rentrée et d’abandonner son semi- remorque. Vingt ans passés dans le monde des routiers. Vingt ans de belles rencontres, d’amitié. Vingt ans d’aires d’autoroute. Jenny repart au volant de son 36-tonnes en direction du Nord. Elle n’écoute pas Alain Souchon mais la radio. Elle essaie de rester vigilante. Ses yeux s’embuent à la vue de la photo de Claudio dans sa cabine.
Aura-t-elle des nouvelles avant son arrivée à Paris? Elle sait que ses amis routiers lui en donneront dès qu’ils en auront. Il existe une grande fraternité dans ce monde de la route, contrairement à ce qu’on pourrait penser.
Elle devait lui rendre un pull prêté lors d’une halte à Lyon. Le pull risque de se retrouver orphelin.
Biographie – Chantal COULIOU
Chantal COULIOU est née à Vannes en 1961, auteure d’écrits poétiques. Elle vit entre Brest et le golfe du Morbihan. De très nombreuses publications en revues : Arpa, Friches, IHV, Lieux d’être, Spered Gouez,… et en anthologies : L’alphabet des poètes, éditions Rue du Monde, Nos bonheurs d’école, Les Arènes, Chaque enfant est un poème, éditions Rue du Monde, Secrets de femmes, éditions Pippa … Une quarantaine de livres publiés (poésie, haïkus, nouvelles)
Poésie
Une traversée de soi, collection Ecriterres, Les Editions Sauvages, 2022, Prix Paul Quéré 2021-2022
Du soleil plein les yeux ( haïkus), éditions Unicité, 2020
Dans les coulisses du jardin, collection AAA, éditions Voix Tissées, 2020
Insulaires ( haïkus), collection Dessert, éditions Les Carnets du dessert de Lune, 2020
Papillotes, tirage limité en typographie, Atelier de Groutel, 2019
Légers frissons, collection Tango, éditions Donner à Voir, 2019
Sur les ailes du poème, collection AAA, éditions Voix Tissées, 2019
Sens dessus dessous, haïkus en collaboration avec Régine Bobée et Choupie Moysan, éditions Envolume, 2018
Seul le bleu demeure , acryliques de Lydia Padellec, tirage limité et signé éditions de la Lune bleue, 2017
Sans préavis, La Porte, 2017
Le temps en miettes, éditions Soc et Foc, 2017
Dans le silence de la maison, éditions du Petit Pois, 2016
Le chuchotis des mots, collection Laluneestlà, éditions Les Carnets du dessert de Lune, 2016 – Prix Joël Sadeler 2017
Croqués sur le vif, collection lalunestlà, éditions Les Carnets du Dessert de Lune, 2012
Variations autour d’une île, 2012, Collection Lieu, éditions Encres Vives
Au creux des îles, 2012, éditions Soc et Foc- Prix Camille Le Mercier d’Erm décerné par l’Association des Ecrivains Bretons 2013
Rapa Nui, 2012, éditions Rafaël De Surtis
Le vieux vélo de Jules, 2010, ( haikus) éditions La Renarde Rouge
Une poignée de mots et un peu de vent, 2009, Coll. Dessert, éditions Les Carnets du Dessert de Lune
A cloche pied, 2009, Coll. A la cime des mots, Tertium éditions
Géographie de l’eau, 2009, Coll. Le Poémier, éditions Corps Puce
Au cœur du silence, 2008, La Porte
Le soleil est dans la lune, 2008, Coll. Le Poémier, éditions Corps Puce
Pour apprivoiser le vent, 2008, encres d’Annie Bouthémy, S’éditions
Ciel de traîne, 2008, éditions Clarisse
La rumeur de l’hiver, 2008, Coll. Blanche, Encres Vives
A fleur de silence ( haïkus), 2007, seconde édition, 2015, Soc et Foc – Liste de référence « lectures pour les collégiens », 2012, Ministère de l’Education Nationale
Carnets de petits bleus à l’âme, 2004, Les carnets du Dessert de Lune
L’avancée des jours, 2004, Eclats d’encre
Point d’attache, 2003, Gros textes
Saint-Denis, fenêtres ouvertes/ en collaboration avec le photographe Pierre Douzenel, 2003, PSD
Jours de pluie, 2003, Club zéro
Lettres à Yvan,2003, La Porte
Il y a des jours, 2001, Fer de Chances
Des chemins de silence, 2000, Blanc Silex
Petits bonheurs, Collection Le Farfadet Bleu, 1999 Le Dé Bleu
Les petites blessures de la nuit, 1998, Cahiers Froissart
Petite suite pour un été, 1998, fer de Chances
Mémoire de pierre, 1998, Encres Vives
Le chuchotement des jours ordinaires, 1997, L’épi de seigle, Prix Press- Stances 1997
De l’algue à la pierre, 1997, Encres Vives
Livres d’artiste
Macules, illustrations de FIL, Les Ateliers Miénnée de Lanouée éditions, 2019
Infini et Un reste de lumière avec la plasticienne Maria Desmée, 2019, chez l’artiste
Pluie sur les rochers avec la plasticienne Choupie Moysan, L3V,mt-galerie, 2014
Grand Large avec Marguerite Rolland ( encres et pastel ) , CMJN éditions, 2013
Nouvelle
Un été au bord de la mer, éditions Unicité, 2021
Une petite pluie, 2006, Les Découvertes de La Luciole