Blandine Rinkel, Vers la violence, Fayard, 372 p, 2022

Une chronique de Nadine Doyen

Blandine Rinkel, Vers la violence, Fayard, 371 pages -20€  – Rentrée  2022 –  Prix Méduse


Un titre frontal, disruptif. Une couverture qui intrigue avec ces quatre dessins qui représentent le loup. D’ailleurs la page en exergue est aussi centrée sur les loups.

 N’est-il pas étrange d’associer la naissance du protagoniste principal, Gérard, avec le loup qui entra dans la légende le 12 janvier 1954 ? 

Mais ne dit-on pas : L’homme est un loup pour l’homme ? La narratrice, Lou, sa fille  ne va cesser d’en faire le constat dès son plus jeune âge.

Celle-ci brosse le portrait du baby boomer qu’elle appelle Gérard, et non «  mon père », façon de prendre de la distance avec ce personnage très complexe, aux nombreux secrets à élucider. Un homme autoritaire, à la voix terrifiante parfois.

Le lecteur sent très tôt l’emprise, la domination qu’il a sur sa fille. Admirative, amoureuse de son géniteur au point de vouloir se marier avec lui. L’amour est d’autant plus aveugle à cet âge. Pourquoi la laisse-t-il penser  (à 5 ans) que cette union sera possible quand elle aura atteint l’âge légal ? Pourquoi lui fait-il une telle promesse ?! «  Seuls les adultes consentants peuvent s’épouser ».

Gérard, ex-militaire, flic de profession, possède des armes, ce qui impressionne sa fille Lou. Il est nimbé de mystère, passant des nuits dans son bureau ovale jaune. Pièce appelée ainsi car au centre trônait « une grande table en forme d’oeuf ».

Lieu où son père  travaillait, se ressourçait, mais où Lou ira fureter, transgressant l’interdit, ouvrant les tiroirs, ce qui ne pouvait que déclencher la furie de Gérard. 

Pourquoi ce nom de code « Bruno » ? Aurait-il une double vie ?

Lou se remémore son enfance, son entrée en sixième, son amitié avec Jade, Victor, prenant conscience que Gérard préférait qu’elle ne fréquente pas ses camarades de classe !  Elle confie qu’« il voulait rester maître de son royaume, que son esprit lui appartienne ». Difficile de comprendre pourquoi il lui refuse de jouer avec les billes découvertes au grenier pour lui donner la permission une semaine plus tard.

Il l’éduque à la dure, lui  conseille d’apprendre à se battre pour être à la hauteur de son nom Meynier qui signifie « robuste guerrier », lui apprend à nager à deux ans. Dès ses 5 ans elle s’aguerrit, son père lui ayant inculqué la devise du mousse : «  Sois toujours vaillant et loyal » et « la sensation du couteau ». Adulte, elle définit Gérard comme « un monstre à deux têtes » qui « affabule, invente, ment », un moustachu « psychopathe amusant »,  « un sorcier de l’univers » et « un ivrogne occasionnel ».

Elle souligne «  son sourire carnassier », son « rire bruyant », sa face obscure.

Comment une enfant peut-elle se construire quand la menace est permanente ? 

Il lui faudra vaincre sa peur quand elle doit traverser un pont en pleine tempête !

Peu à peu le voile se lève sur le passé du patriarche au sujet du drame du naufrage, (ce qui explique qu’il vivait dans un huis clos de disparus) et  de l’accident tragique impliquant Pluie, ce cheval qui les accompagnait lors de randonnées en forêt. 

La figure maternelle, Annie Mercier, est une présence discrète, elle aussi subit les menaces de son époux. Quand celui-ci rentre alcoolisé, agressif, il sème la terreur. Il hurle, il beugle, il gueule contre les connards qui salopent la mer, la plage. Quel contraste entre les mots affectueux que le père emploie à l’adresse de sa fille : «  moussaillon », « Loupiote », et la violence de ses gestes (Ne l’a-t-il projetée d’un coup de pied en bas d’un escalier ?)  et certaines de ses paroles ( injures).  L’épouse est traitée de connasse, de « vioque ». Pas de smartphone à l’époque, la mère consignait tout sur un post-it.

L’écriture de l’écrivaine est très visuelle, d’une précision inouïe , on croit voir les scènes se dérouler sous nos yeux. Par exemple quand elle revisite les moments de bonheur partagés avec le père, leur « lien de la mer » ( «  les souvenirs bleus »), le jeu de la barbichette, les tours de magie, leurs partages de mondes imaginaires ou quand elle évoque leurs marches, les paysages traversés, empruntant « des routes jouxtant le jaune des champs d’orge et de colza, le vert du maïs, des blés, le bleu des pavots…. », «  des départementales bucoliques ». Ou tout simplement quand elle s’achète une gaufre liégoise, « ornée de perles de sucre ». 

Blandine Rinkel a le don de happer son lecteur par les accroches de certains chapitres, comme «  il y eut un épisode terrible ». La maltraitance animale évoquée révulsera tous ceux qui luttent contre ce fléau.

La romancière reconnaît qu’adolescente, elle aussi s’est montrée  « infecte » envers Ardent, ce chien attachant que son « bourreau de père » a failli défenestré. Et elle fustige « l’injustice de sa cruauté », de sa méchanceté causée par mimétisme.

Elle sait attiser notre empathie pour ces bêtes sans défense, tel ce cheval qu’il a abandonné dans le fossé où il avait chuté. Au contraire Lou, devenue végétarienne, montre son attachement aux chevaux et rejette la consommation de viande chevaline. Nourriture que son père lui a imposée  dans son enfance. Pour elle : « La magie des chevaux ne réside pas dans leur viande, mais dans leurs mouvements. Dans leur crinière et dans leurs muscles. Dans la manière qu’ils ont d’être libres quand ils courent ».

Au cours du récit, Lou s’interroge sur la misogynie de Gérard d’autant qu’il disait «  aimer les femmes, les vraies », les femmes guerrières, pourtant dans ses notes  autobiographiques, on lit les déclarations suivantes : « les femmes sont des couteaux » ou « se méfier des femmes ». Aurait-il été attiré par ces « femmes  féroces, indifférentes, hermétiques à la séduction », ces femmes écrivaines en lutte comme Virginie Despentes, Constance Debré à qui Lou rend hommage ?

À la fin de la lecture de la première partie, le lecteur est comme abasourdi tant la violence s’est intensifiée. À 18 ans, la narratrice, quitte sa Vendée aimée  pour rejoindre à Londres une compagnie de danse. « La danse, une technique de survie » pour Lou, un exutoire, qu’elle pratique d’une façon militaire, « un sport exigeant une autodiscipline ». Elle développe une longue réflexion sur la danse : «  la danse comme stratégie animale pour esquiver les corps prédateurs ». Cette décision convoque une pensée de Colette : « Il n’y a de réel que la danse, la lumière, la liberté, la musique ». Rappelons que l’écrivaine chanteuse pratique elle-même la danse au sein du collectif Catastrophe.

Liberté qui se traduit pour Lou sur le plan sexuel ( jeu du foulard) jusqu’à ce qu’elle tombe amoureuse de Raphaël, qui rallume sa féminité, alors qu’elle avait été éduquée, en soldat, comme un petit monstre de virilité », quand elle était sous la coupe du paternel. Un père peuplé de blessures, « de cicatrices et de deuil ».

Un épisode déstabilisant la marque : « la tache » au plafond de son logement londonien. Laissons le mystère.

Un mot interpelle dans la dernière partie, celui de « meute », qui renvoie à l’illustration de la couverture. La famille  est considérée comme « une horde de cohortes », les voitures sont vues comme une meute. « Meute », le nom de la compagnie de danse qu’elle formera. Et le prénom Lou, qui résonne comme loup ! 

On quitte le jeune couple se préparant à un réveillon forestier avec les animaux. Ils se tiennent à l’affût, sachant ( comme Sylvain Tesson) qu’il leur faudra de la patience, cette « vertu suprême » et rester silencieux pour espérer entrevoir une meute ou un loup solitaire. Et fantasmer de « danser avec les loups » ! La boucle est bouclée.

L’originalité de ce roman réside dans sa composition hybride, mêlant le récit de Lou,  les notes autobiographiques du père qui révèlent une autre facette de cet « ogre » et au final la bouleversante lettre confession de Lou qui montre la complexité de leurs liens. Et combien il l’a vampirisée. Une lettre qui dévoile sa réponse quant à un éventuel don de rein pour ce père condamné.

Un récit émaillé de citations, d’expressions en italiques, dont certaines en anglais ( « delay », «  fake news », «  larger than life »…) et de comparaisons. ( « la vague immense se ruait sur nous comme un cheval piqué par une abeille »).

Blandine Rinkel signe un roman puissant, dense, scandé par le mot « violence » dont a hérité la narratrice Lou, et hanté par les spectres des fantômes. Un récit impressionnant, parfois glaçant qui laisse une durable empreinte chez le lecteur. 

© Nadine Doyen

Benoît Duteurtre, DÉNONCEZ-VOUS LES UNS LES AUTRES, Fayard, ( 187 pages – 18€)

Une chronique de Nadine Doyen

Benoît Duteurtre, DÉNONCEZ-VOUS LES UNS LES AUTRES, Fayard, ( 187 pages – 18€)


Benoît Duteurtre renoue avec la veine satirique de précédents ouvrages :En marche et L’ordinateur du paradis.

Il se plaît à imaginer une société qui encourage la délation, comme certains n’ont pas hésité à le faire lors du confinement : «  Dénoncer n’est pas seulement un droit, mais un devoir et un acte de courage. Ceux qui préfèrent entretenir le silence s’exposeront à l’accusation de complicité».

L’écrivain met en scène le couple Fischer, composé de Mao et Annabelle, de leur fils Barack et décrypte leurs mœurs. Des prénoms pas choisis au hasard ! Mao doit son nom à des parents d’extrême gauche désireux de célébrer la Révolution culturelle chinoise ! Ce dernier qui n’aimait que la démocratie américaine, n’a pas hésité à son tour à nommer son jeune fils Barack, un prénom d’homme politique, « en hommage à Obama ». Quant à la petite amie de Barack, Robert , elle doit ce prénom masculin à « une mère très engagée contre les stéréotypes de genre » ! L’administration a validé.

On plonge au sein de cette famille aux vues divergentes, confrontée aux nouvelles réglementations. Désaccord entre le père et le fils à propos de l’écologie, de la condition féminine, des gays. Le chapitre d’ouverture, au titre choc « La mort d’un poulet » fera réagir selon que vous êtes « viandard » ou « antispéciste » et devrait plaire au Parti animaliste ! Pour Mao qui aime les agapes, pas question de renoncer au sublime poulet croustillant bien que son fils s’efforce de le dissuader de manger un animal.

 Désormais il devra occire le poulet lui-même, depuis l’instauration de la loi de responsabilité alimentaire. Le slogan : «  Tuez votre viande vous-même » circule dans les Ateliers carnivores, le meurtrier est filmé à la sortie, propulsé sur les réseaux, mais Mao, la soixantaine, « ancien responsable des services culturels de la ville » n’est pas pour autant intimidé. Il sait s’affranchir de la tyrannie de la culpabilité !

Autre loi celle du tri, plus contraignante que dans En marche. Les acronymes fleurissent comme S.I.N. (Sans identité numérique) ou B.F.C.( Bac de Fumier Citoyen ) que chacun doit posséder. C’est dans un Centre de recyclage que Robert croise Giuseppe di Meo, 74 ans, un rebelle qui refuse le tri sélectif et préfère vivre reclus. Un être mystérieux, que Robert réussit à approcher, à amadouer. Cette rencontre fortuite conduit la jeune femme à rendre visite à cet ermite, une gloire oubliée, dans le but de l’aider. Une parenthèse hors du temps pour elle dans cette maison, ressemblant plutôt à «  un palais des mille et une Nuits ». Maints décors, ainsi qu’une variation musicale, s’offrent au visiteur au fur à mesure de l’ascension, des décors dignes de ceux de théâtres. Pour pallier à la pénurie d’électricité, on pédale ! On éclaire aux bougies. D’autant que la loi de protection de la nature interdit tout gaspillage d’énergie.

Giuseppe fait un bras d’honneur à la « cancel culture » qui censure certains films. Lui, veut les visionner dans leur intégralité. Avec la touche cancel/effacer, on est passé à une société de contrôle révisionniste. Au théâtre Molière est dénoncé comme sexiste tout comme s’adresser à quelqu’un en utilisant «  Mademoiselle » : Cet artiste, à la gloire passée, se considère « un dissident » pour aimer des «  choses révolues comme «  la séduction, la viande rouge, la cigarette… ». 

L’amitié tissée entre Robert et Giuseppe déclenche la jalousie de Barack. Toutefois , lors d’un goûter que le vieil homme organise pour des « happy few », sorte de « réunion citoyenne LGBT », Barack va être à son tour fasciné par l’antre de cet original, « vieil élégant ». 

Quant aux confidences si spontanées et stupéfiantes d’Annabelle révélées à Robert, elles ont renforcé leur complicité. Des secrets les lient. Les deux femmes se comprennent.

Qu’en est-il de l’amour pour le jeune couple ? Il est uni par un « amour chaste », Barack a 18 ans, mais Robert n’est pas encore majeure, bien que quelques mois seulement les séparent. Barack ne veut pas être victime d’accusation à l’ère du #metoo ! Il tient à « éviter tout geste inapproprié, à peine se toucher ». Penserait-il comme Victor Hugo que « L’amour chaste agrandit les âmes » ?

C’est un vrai séisme dans la famille de Mao quand celui-ci se retrouve accusé de harcèlement. Déchaînement sur les réseaux où la foule réagit, châtie ! Enquête de la Brigade rétroactive. La loi «  Dénoncer et Protéger » s’applique. Une avocate le conseille. Sa femme le soutient. Un inspecteur de police a fouillé son passé et a déniché des photos compromettantes. Difficile de nier !

Rebondissement lors du procès, quand l’anonyme du Net, qui accusait Mao de « briseur de vie », sous le pseudo @barbarella , prend la parole et révèle sa vraie identité ! Tsunami dans la salle quand la plaignante se dit victime d’un comportement sexiste, blessée d’avoir été reléguée au rôle de femme au foyer et d’avoir vu « son élan professionnel » brisé. Coup de massue pour Mao qui « retombe sur son siège groggy » !

 Comment s’en sortira Mao? Prison ? Maison de correction ? Centre de réintégration ? Stage vertueux de sauvetage de la planète en participant à un programme d’énergie propre? S’ajoutent des charges d’écocide pour avoir favorisé la création du Musée de la femme.

A noter les propos de Benoît Duteurtre dans une Carte Blanche (1) :

« La révélation d’affaires réellement graves, de crimes sexuels justifie-t-elle que la société tout entière se transforme en entreprise de dénonciation publique, dans laquelle une presse surexcitée porte à la connaissance de chacun les méfaits les plus terribles comme les plus ridicules? Les conséquences, elles, sont toujours désastreuses : à savoir la destruction sociale de l’accusé, totale ou partielle, provisoire ou définitive, même en l’absence de preuve, de plainte ou de jugement ».

Désormais l’épouse accusatrice bénéficie de la mesure «Protection-femmes » avec le luxe  d’avoir à sa disposition un chauffeur et une limousine « polluante » ! Que de paradoxes dans cette société !

Les liens de la famille Fisher avec Robert et Giuseppe seront-ils fissurés ou encore plus soudés ? C’est dans un décor lénifiant de Toscane, sous un olivier, au soleil couchant, traversé par un parfum de glycines et les chants de cigales que le lecteur quitte les protagonistes de cette comédie !

L’écrivain, contempteur de notre société et visionnaire, à la plume satirique, à la verve insolente, aime anticiper. Doit-on y voir un aspect prophétique dans cette dystopie ? Il raille cette municipalité qui a mis en place des voitures vertueuses, des « proprettes » vite devenues des « salopettes »!

Benoît Duteurtre signe « une sotie » (2) d’une époque pas si éloignée de la nôtre. Il se glisse dans le rôle d’un lanceur d’alerte et nous fait redouter de connaître une multiplication de telles lois tyranniques dans notre pays. Percutant et drôle. Un pamphlet qui ne manque pas de faire réagir.

© Nadine Doyen

(1)  Extrait d’une Carte Blanche publiée dans Marianne du 9/02/2022 : Au pilori.

(2) : Sotie : farce de caractère satirique, allégorie de la société du temps.

Frédéric Vitoux de l’Académie française L’Express de Bénarès – A la recherche d’Henry J.- M. Levet, récit, Fayard

Chronique de Nadine Doyen

 Frédéric Vitoux

                                      de l’Académie française

L’Express de Bénarès  

A la recherche d’Henry J.- M. Levet

                 récit, Fayard    Janvier 2018 ( 19 € – 2076 pages)

Qui connaît de nos jours Henry J.-M. Levet,(1) l’auteur des Cartes postales, exotiques,« sonnets torrides » autour des voyages ? « Insaisissable » il reste pour Fédéric Vitoux qui, pourtant, a consacré deux années à retrouver ses traces. Quête qui l’a mené de Paris (Rue Lepic, Montmartre) à Vichy (août 2015), puis à Montbrison (sa ville natale), dans les bibliothèques et jusqu’aux archives des Messageries Maritimes à Marseille.

Dans le premier chapitre intitulé « Un ami inoubliable », l’académicien explique sa rencontre foudroyante avec l’écriture de ce poète, à dix- sept ans. Les dix poèmes, regroupés à la fin de l’ouvrage, il les a appris par coeur au point de les « imprimer durablement dans la cire vierge de sa mémoire ». Grâce à la bibliothèque familiale débordant de milliers de livres, l’auteur a pu assouvir sa curiosité et se nourrir de classiques et de poésie. C’est dans une nouvelle édition de L’Anthologie de la poésie française de Kra qu’il a débusqué Levet dont les récits ont « ouvert les portes de son imagination ».

Quelle curieuse coïncidence de réaliser que son grand-père Georges Vitoux, à qui il dédie ce récit, a voyagé, comme lui, sur le même « paquebot-poste », « l’Armand Béhic ». Celui-ci avait été mandaté pour « une mission d’enquête médicale » en Chine, en 1903, juste un an après Levet, poète consulaire. Frédéric Vitoux va nous embarquer à bord de ce navire, à « la belle silhouette » pour suivre ce « poète maritime », qui le hante.

L’étudiant a fait escale à L’Étrave, la petite librairie de L’île Saint-Louis, tenue par Nicole, pas encore Madame Vitoux, afin de dénicher du Levet et de poursuivre l’exploration de ses poèmes, qu’il analyse ici avec subtilité.

Saluons le talent prescripteur de l’auteur, tout juste âgé de 18 ans, qui réussit à épuiser le stock de cette édition dirigée par Jean Paulhan.

Frédéric Vitoux est confronté de nouveau à une série de coïncidences au cours de ses recherches. Tout d’abord, tous deux ont écrit un opus intitulé Cartes postales.

Autre exemple, il trouve dans une brocante un ouvrage de Francis Jourdain dans lequel il note sa complicité avec Levet. Il étaye son portait grâce aux écrits de Fargue et Larbaud (qui avait consacré à Levet le Cahier 12 des Amis de Valery Larbaud), en guise de reconnaissance. Larbaud qui a donné son nom à la médiathèque de Vichy  qui détient ses archives et où l’auteur a reçu le Prix Larbaud.

Levet est connu pour ses « accoutrements légendaires », de vrais déguisements, « coiffé d’un fez » ou de casquettes.

Des photos, des portraits sont insérés ainsi que l’affiche de Vallotton, et celle de Villon le représentant au Grillon. On remarque son «  nez pointu, à nul autre pareil, son menton pointu, en galoche, dandy provocateur, esthète ».Un physique ingrat.

Tout en retraçant le parcours de Levet, compilant les informations glanées, le romancier décline sa généalogie, remontant jusqu’à son arrière-grand-père.

C’est en compulsant des articles parus dans Le courrier français (2) que l’auteur détective a mieux cerné sa personnalité (antimilitariste, un flegme britannique …).

Il y débusque « ses désirs refoulés, ses inclinations homosexuelles », mais il s’avère « difficile de saisir sa vie – son existence météorique aux mille facettes, aux mille secrets surtout ». L’homosexualité apparaît être un thème récurrent dans ses poèmes.

Frédéric Vitoux focalise notre attention sur les deux recueils de poésie, nous éclaire sur le sens caché de ces vers « incompréhensibles », « des rébus » pour Tardieu.

Le désir d’Orient est supposé dû à l’influence de Rimbaud. C’est en tant que publiciste qu’il s’embarque, en 1878, chargé d’une mission scientifique, « d’études de l’art khmer », poste décroché grâce à son père député. Sur cette expédition, l’auteur soulève « une forêt d’interrogations », s’étonnant de l’absence de traces.

En 1902, il sollicite un poste de vice-consul et le voilà nommé à Manille puis à Las Palmas, où le climat océanique ruinera sa santé. La maladie met un terme à sa carrière. Un destin tragique que cette mort à 32 ans.

Saluons la démarche de l’académicien auprès du maire de Montbrison. En effet, attristé de voir la tombe de Levet en ruine, il le presse par courrier, d’effectuer une restauration. Requête honorée en 2016. Rappelons aussi qu’il a oeuvré pour la sauvegarde de la maison de Colette.

On devine la frustration du narrateur quand au fil de son travail ardu, il confesse que :

« Plus je m’approche de lui et plus il se recule… ». Impossible de compter sur les parents de Levet, des notables respectables, ceux-ci n’ayant rien gardé de sa correspondance, de son manuscrit supposé, intitulé : « L’express de Bénarès ».

N’était-il qu’une mystification, un projet littéraire fantôme ?

Toutefois, par son pèlerinage, il aura contribué à nous faire connaître cet « insaisissable » poète et à nous faire « rêver de Levet ». Puisse cette rencontre aussi réchauffer et éclairer le lecteur comme ce fut le cas pour l’académicien.

On écrit pour témoigner, pour que l’on n’oublie pas, et Frédéric Vitoux, par ce récit très fouillé et enrichissant, ressuscite cette figure de Montbrison et le Montmartre bohème des années de la fin du XIXème siècle où l’on croise Morand, Toulet.

Il a le mérite de sauver de l’oubli le poète Levet, car il ne reste que quelques rares lettrés pour « continuer de chérir la mémoire de l’auteur des « cartes postales ».

Et l’écrivain enquêteur de fantasmer sur l’établissement d’« une anthologie des livres non écrits ou disparus », comme David Foenkinos avait imaginé la bibliothèque des livres refusés !

© Nadine Doyen

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(1) Henri Jean-Marie Levet (1874–1906), écrit parfois : Henry Levet et même  anglicisé en Levey.

(2) La bibliothèque Forney est l’une des seules à conserver les volumes reliés du Courrier français

Quelques extraits :

« Ni les attraits des plus aimables Argentines

 Ni les courses à cheval dans la pampa,

 N’ont le pouvoir de guérir de son spleen

 Le Consul général de France à La Plata ! »

«  L’Écosse s’est voilée de ses brumes classiques,

  Nos plages et nos lacs sont abandonnés ;

  Novembre, tribunal suprême des phtisiques,

 M’exile sur les bords de la Méditerranée… »

Leçons inaugurales du Collège de France Alain Macbanckou : Lettres noires : des ténèbres à la lumière

Chronique de Nadine Doyen

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Leçons inaugurales du Collège de France

Alain Macbanckou : Lettres noires : des ténèbres à la lumière, Collège de France /Fayard, (75 pages – 10,20€)


Le 17 mars 2016, Alain Mabanckou, Prix Renaudot 2006, avait fait converger au Collège de France (1) toute l’intelligentsia parisienne, ses collègues et les anonymes, dont ses fervents lecteurs, tous prêts à boire les paroles de cet écrivain prestigieux,  au parcours singulier.
Mais qu’entend -t-on par leçon  inaugurale?
Il s’agit du premier cours d’un professeur nouvellement nommé au cours duquel il présente ses objectifs. Pour Alain Mabanckou, occuper « la chaire annuelle de Création artistique 2015-2016 », est un moment solennel et historique, puisque ce poste était resté inoccupé depuis 2005 et en plus le confier à un écrivain était une première. Il ne cache pas sa joie, sa fierté de rejoindre cette institution, remerciant ceux qui l’ont élu pour leur « détermination à combattre l’obscurantisme et à convoquer la diversité de la connaissance ». Mais on devine l’angoisse d’Alain Mabanckou devant une telle lourde charge. « Cruelle responsabilité », confie-t-il.
Avec humilité et humour, Alain Mabanckou s’interroge sur sa légitimité au sein de cette famille dans laquelle Antoine Compagnon souhaitait le voir intronisé.
Avec une pointe  d’autodérision, il lance à ses collègues : « Et si vous vous étiez trompés de personne ? Leur laissant la possibilité de se « rétracter », en cas d’erreur.
Il ouvre son discours en rappelant que Paris fut à une époque « le phare du monde noir », que le mouvement antiraciste a mis un terme à cette publicité banania (qui stigmatisait  les Africains et à « son slogan dévastateur ».
Il retrace l’évolution « de la pensée noire », évoque « les Noirs de France » et l’ arrivée sur les écrans de films de la « négritude ». En 1950,Paris devient « la ville de l’émancipation des noirs ». En 1959, « c’est l’Africain qui dissèque la civilisation occidentale » chez Bernard Dadié pour « réhabiliter et exalter l’Afrique ».
Lui, à la fois congolais et français, n’hésite pas à fustiger la France pour sa question des binationaux et son incapacité à tirer partie de sa population multi culturelle, pourtant un atout.
Comment se définit Alain Mabanckou ? Il hésite : « un Congaulois » ? Un « binational » ? Un homme au « nez épaté », né avec le désir de conter, de raconter.
L’objectif d’Alain Mabanckou est de montrer comment « la littérature d’Afrique noire et la littérature coloniale française sont à la fois inséparables et antagoniques ». D’où la nécessité de ne pas plonger dans « le fleuve de l’Oubli » les écrits coloniaux.
A travers plusieurs ouvrages de références, Alain Mabanckou montre la vision que, depuis l’Europe, les explorateurs avaient de L’Afrique, «  territoire des légendes ».
Il présente l’érudit  hollandais Dapper, qui donna son nom au Musée parisien consacré « aux arts d’Afrique noire », créé en 1986.
Il rend hommage aux précurseurs, tels que l’écossais Mungo Park, qui casse « le mythe du bon sauvage » et son homologue René Caillié, qui avec Voyage à Tombouctou lance « la littérature d’exploration africaine ». En 1921, René Maran est le premier lauréat noir à remporter le prix Goncourt pour son roman : Batouala ,qui se révèle « une charge  littéraire virulente » destinée à combattre « la thèse de la supériorité de la culture blanche ».
Il décline les romans d’aventures, d’exotisme qui ont sublimé l’Afrique. Toutefois, cela restait une  littérature coloniale, « esclavagiste », « négrophile ».
Marcel Griaule marque un tournant quant à son regard tourné vers l’humain.
Gide, à son tour, révèle « le travail forcé, les abus, la brutalité des compagnies concessionnaires », tout comme Albert Londres relate « les prétendues ténèbres » dans Terre d’ébène.
Dans son enseignement, Alain Mabanckou désire mettre en lumière une pléiade d’auteurs dont Cheikh Hamidou Kane, Camara Laye qui ouvrent deux voies nouvelles. Ahmadou Kourama (Prix Renaudot) montre les conséquences de l’indépendance : « l’éclat de soleil attendu » conduit à la désillusion, « le colon blanc ayant été remplacé par le dictateur noir. »
Les revues (L’Étudiant noir, Présence africaine) ont contribué à faire rayonner Césaire et Senghor, Fanon, Diop et ont permis « une émancipation des mots, des idées, des hommes ».
L’écrivain salue « l’arrivée des femmes dans le paysage littéraire » dans les années 1970 dont deux Sénégalaises. Pour en savoir plus sur Aminata Snow Fall, Alain Mabanckou nous signale avoir consacré un chapitre à cette romancière dans Le monde est mon langage (Grasset). On voit apparaître une littérature de la « migritude ».
Alain Mabanckou dresse un panorama de la littérature contemporaine, soulignant que « le salut réside dans l’écriture » et adresse son exercice d’admiration envers ceux qu’il lit et estime, ceux « qui brisent les barrières et refusent la départementalisation de l’imaginaire ». Parmi les auteurs primés de sa génération qu’il cite, on trouve des femmes : Virginie Despentes, Marie NDiaye,  Marie Darrieussecq et pour les hommes : Serge Joncour : Prix des Deux Magots 2015 ; les prix Goncourt 2004 :Laurent Gaudé,   2011 : Alexis Jenni et 2015 :Mathias Enard.
Alain Mabanckou, en libre créateur, achève son discours en annonçant sa volonté  « d’entreprendre des voyages à travers la production littéraire africaine » et de « s’appesantir sur  l’aventure de la pensée africaine » sans négliger « l’Histoire passée ou contemporaine » ni « l’attitude de l’écrivain devant l’horreur ».
Il tient à  démontrer « la richesse des études africaines » devenues « une discipline autonome dans les universités anglophones ». Et souhaite voir se développer en France « les études africaines » dans « chaque espace où le savoir est dispensé », conscient que ce « sont des domaines considérés comme suspect en France ».
En héritier de «  la fracture coloniale », Alain Mabanckou souligne notre passé commun,  rappelant que « l’histoire de  la France est aussi cousue de fil noir ».
Gardons en mémoire son message universaliste : «  Le monde est une addition, une multiplication, et non une soustraction ou une division ».
L’éminent Alain Mabanckou  livre un texte enrichissant, truffé de pistes de lectures pour ceux désireux d’approfondir leur connaissance de la littérature africaine.
C’est aussi une invitation à découvrir ou relire l’oeuvre imposante de l’auteur dont les deux derniers romans Lumières de Pointe-Noire  et Petit Piment.
Guettons la couverture du prochain roman pour savoir si elle portera la mention  « véritable roman nègre », en hommage à René Maran, comme il l’annonça !

 

©Nadine Doyen


(1) Le Collège de France est une institution crée en 1530, avec pour devise :
« Docet omnia, il enseigne toutes choses ».
« Plusieurs chaires annuelles thématiques permettent d’accueillir des professeurs invités pour une année ».

Frédéric Vitoux, de l’Académie Française, Au rendez-vous des Mariniers ; Fayard (20, 00€ – 310 pages)

Chronique de Nadine Doyen

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Frédéric Vitoux, de l’Académie Française, Au rendez-vous des Mariniers ; Fayard (20, 00€ – 310 pages)

Comme pour Grand hôtel Nelson, une photographie sert de déclencheur au récit.
Ici, c’est le cliché de Louis Foucherand représentant le bistrot-restaurant du quai d’Anjou, un lieu qui n’habite plus les souvenirs d’enfance de Frédéric Vitoux, alors qu’il passa devant de multiples fois.
A partir de cette photographie, exhumée par son épouse Nicole, à qui il dédie le roman, l’auteur remonte le temps et faire revivre Le Rendez-vous des Mariniers avec sa clientèle depuis son acquisition par la famille Lecomte en 1904, ses heures de gloire, de prospérité, puis avec ses deux successeurs jusqu’à sa fermeture en 1953.
L’auteur nous livre une description très détaillée de ce bistrot où l’on mange sur le marbre nu, et où l’addition est présentée sur une ardoise, et insère des photos.
Il rend compte de toutes ses innombrables recherches pour tenter de retrouver des descendants de ceux qui ont géré ce restaurant et également de ses lectures pour vérifier si tel auteur a bien fréquenté ce lieu mythique. La page de remerciements atteste de cette passionnante enquête menée à quatre mains.
Frédéric Vitoux nous confie ses intuitions, ses interrogations, par exemple savoir où a bien pu passer le livre d’or du restaurant. Curieuse coïncidence, Nicole, venant d’ouvrir sa libraire L’Étrave, en 1961, a exposé « ce talisman » dans sa vitrine, déjà constellée de signatures de célébrités, des dandys de la littérature.
Quand Frédéric Vitoux manque d’informations, il ne cherche pas à broder, fait parfois confiance à son intuition. Souhaitons que ce livre lui permette de retrouver des héritiers des Lecomte, le net permettant cet espoir.
L’auteur nous convie au rendez-vous de l’intelligentsia qu’il va faire défiler au fil des ans, comme dans un film. Ce lieu, d’abord prisé par les Américains, devient une vraie ruche, d’autant que l’île Saint-Louis se révèle détenir une concentration d’écrivains étonnante, sorte de « microcosme de la France », « un village », « un état d’âme » à l’unisson de « l’humeur ô combien diverse de ses habitants ». Le narrateur s’attarde sur les clients qui font de cette « gargote » leur refuge, leur havre de paix. Qui sont-ils ? « lavandières, ouvriers, artisans voisins, employés des compagnies fluviales… ». Ceux de « la génération perdue ». On voit les amitiés naître, puis se lézarder. L’ « effervescence culturelle » parmi cet aréopage montre que la course aux Prix (Fémina, Goncourt) débouchait déjà sur des scandales.
Parmi les sommités qui se délectèrent de la cuisine «  hors pair », renommée de Mme Lecomte, on croise Jean de La Ville de Mirmont, poète, fauché par la sale Grande Guerre qui inspira à Jérôme Garcin le magnifique roman Bleus horizons. De lui, il faut retenir ses poèmes, et aussi Les dimanches de Jean Dézert. L’atmosphère, on en trouve trace dans sa correspondance : « les ouvriers sont sympathiques, plus polis que les bourgeois. Là trônent de grosses lavandières. Nous échangeons de joyeuses plaisanteries ». Pas de barrière de classes. Il y trouvait « comme une consolation ».
S’y retrouvent  aussi «  l’insaisissable » Dos Passos et Hemingway, lors de leurs passages à Paris. Frédéric Vitoux nous plonge au coeur de leurs romans, tout en détaillant leurs tribulations et en glissant des remarques pour éclairer la quintessence.
Il développe sa vision de l’amour et l’amitié qui « vous ouvre le monde ».
Quant à Simenon, « forçat de la plume », qui s’amarra quai d’Anjou, en août 1931, l’auteur s’imposa de relire toute son oeuvre, persuadé y trouver une mention des Mariniers. Il ne cache pas son admiration pour ses romans exempts de politique.
On entend Tristan Tzara et ses compagnons crier Dada ! Dada !
Plus tard, on croise le trio Mauriac, Fernandez, Céline, lors du dîner du 23 mars 1933. L’auteur, en spécialiste de Céline, nous dévoile ses différentes facettes : d’une part «  sociable, encore fréquentable » puis, « aigri, misanthrope et désespéré ».
Il expose ce qui oppose Céline et son « délire ou fou rire le plus apocalyptique » à Mauriac, « chat patelin et griffu, tapi, aux aguets » concernant la foi et la chair.
Se sont aussi attablés des héros de roman, comme Aurélien du roman éponyme d’Aragon. A leur tour entrent en scène Cyril Connolly, écrivain et critique anglais et Bernard Frank, « l’un des meilleurs chroniqueurs, des plus personnels observateurs de la vie littéraire de son temps ». Leur lien commun ? Une femme : Barbara Skelton.
Blaise Cendrars, « poète, écrivain, globe-trotter » n’a-t-il pas mentionné cette enseigne des Mariniers et les quais de bouquinistes dans Bourlinguer ?
A vous de découvrir le nom de cet « homme qui a embrassé tout un siècle », par qui Fédéric Vitoux est heureux de « boucler sa liste ».
Le récit est ponctué de dates : 1924 : proclamation de l’indépendance de l’île, naissance du journal Le Sémaphore. Juin 1966 : organisation du festival de l’île, en hommage à Joris Ivens dont la compagne Marceline Loridan est revenue de l’enfer.
Au fil des pages, Frédéric Vitoux entremêle des faits relatifs à sa propre famille, dont il nous a déjà entretenus dans de précédents romans. Il brosse les portraits de ses grand-parents, « germanophobes ». Il pose un regard perplexe sur leur couple.
Il retrace le parcours de son père, « orphelin à 25 ans », qui s’est affranchi du « joug maternel et de son anglophobie asphyxiante » à Heidelberg : « des mois de bonheur, de liberté », mais qui connut plus tard la détention à Clairvaux. Il cite des extraits de ses souvenirs. L’auteur révèle l’origine de la devise retenue pour son épée d’académicien. Les chats ne sont pas oubliés dans ce roman, d’autant qu’ils « ont toujours été nombreux dans l’île Saint-Louis », utiles pour éloigner les rats. Mais aussi compagnons des écrivains. Drieu apparaît dans une photo avec un siamois.
L’Académicien Frédéric Vitoux, d’une érudition à donner le vertige, signe un roman de souvenirs et de confessions, minutieusement documenté, traversé de multiples ombres, donnant la première place aux lieux et à ceux qui les habitent, d’où un triple intérêt. En amoureux de son île « ensorcelée », déjà présente dans Jours inquiets dans l’Île Saint-Louis, il nous fait partager son attachement et arpenter celle d’autrefois, « où régnait un sentiment de magie », et de maintenant, baignée dans « une douceur léthargique ». Contrastes sidérants.
Le Rendez-vous des Mariniers, pivot du récit, « lieu de ralliement du Tout Paris », restitue cet art de vivre et de manger à l’époque de son aura, où « Paris était bien une fête », mais aussi le contexte historique (l’après-guerre, les années folles, la débâcle de 40, l’Occupation).
Et enfin l’auteur dresse un très complet panorama littéraire depuis Jean de La Ville de Mirmont jusqu’à Simenon, Aragon, Cendrars, une invitation en quelque sorte à les lire ou à pousser la porte du Rendez-vous des Mariniers. Ces « antémémoires » préfigureraient-elles l’ouvrage suivant : Les Mémoires de Frédéric Vitoux ?

 

©Nadine Doyen