Éric Chassefière, Pour que parle la beauté, Rafael de Surtis éditions, 2025.
À part un inédit consacré au Cambodge, Éric Chassefière rassemble ici ses récits de voyages, la plupart déjà publiés à Encres vives, aux éditions de l’Atlantique, Alcyone ou Sémaphore. Le livre est dédié à Michel Cosem, qui l’encouragea en cette voie d’écriture.
Le titre résonne à la fois comme un choix d’écriture, et peut-être un appel à percevoir, accueillir la beauté de la Terre en ces temps obscurs. La beauté pour l’auteur nait de la saisie par les mots : « ce n’est qu’en cherchant à nommer / créer l’étincelle sur la pierre / que nous accédons à la beauté ». À l’instar d’André Breton, il préfère l’image « tournée au possible vers la santé, le plaisir, la quiétude, la grâce rendue… Elle a pour ennemis mortels le dépréciatif et le dépressif ».
Surtout attiré vers l’Orient, l’écrit sur la route garde toujours la même approche des lieux, des cultures et des êtres, pleine d’attention et de tendresse. Le corps se laisse pénétrer par les formes, couleurs, senteurs, musiques, cuisines, il en garde des éclats, « flamme étincelante d’un sari » ou « vieille peau craquelée de la terre »…
Les pores traversés de brume ou de lumière, l’être s’ouvre à l’esprit des lieux, temple ou montagne, sacré ou profane. « Celui qui sait que voir / exige l’effacement / la douceur de la présence » se tourne vers l’autre, intense et fugace relation tissée à travers les regards, les sourires, la grâce d’une serveuse, la plongeuse aux yeux plissés, le pope photographe ou ce vieil homme assis face à la mer … Rien de touristique en cette approche, « le voyage est à l’intérieur ». En quête d’instants d’éveil au monde, à la présence, où tout soudain s’illimite dans l’espace et le temps. Réveille la mémoire personnelle ou collective, passé d’oppression ou de misère. L’écriture se fait sensible au ruissellement incessant des apparences, à l’infinie mouvance de la vie. Parfois le monde flotte, vibre, tourne, vacille, glisse, s’efface…Une prose souple et fluide épouse le multiple, avec la conscience lucide du risque d’émiettement si le fil ou le souffle ne relient plus le flux. On y perçoit le musical retour de motifs de l’œuvre, arbre, lac ou jardin d’enfance.
Écrire son voyage, ici, c’est s’amplifier, s’unir à toutes les formes du vivant, dépasser sa propre vie, « sentir couler en soi le sang de la montagne », « battre de la brûlure des pierres », sentir jusque dans son corps vibrer la terre…Plus encore, c’est « le sentiment d’atteindre au merveilleux, à l’inexplicable »
Éric Chassefière, Garder vivante la flamme du poème, préface d’Annie Briet, Collection Cahier nomade, Sémaph(o)re éditions, octobre 2024, 14€, 134 pages.
On ouvre un livre, on ouvre une fenêtre. On lit une strophe, on pénètre en un jardin dont on ne sait jamais très bien s’il est le fruit d’un rêve, le reflet de soi-même, du monde à appréhender. On butte sur une pierre, on savoure un mot, on apprécie le silence qui émerge de cet instant zéro où rien n’est pas encore cette fleur, sa saveur que l’écriture essayera d’apprivoiser pour la page.
On parcourt le livre, on prolonge l’incursion, on va en un sens comme le vent, on en revient par le souffle, porté au-delà par une inspiration qui ne semble plus être la sienne mais celle de cet autre inconnu. Insoluble. Au bout de chaque expérience, on se sent sensibilisé aux choix du vivre, de vivre ensemble, de vivre seul. Au bord de toutes les frontières, se découvrir dans la limite. Soi. Soi seul. Soi illusionné. Soi impertinent, incrédule. Soi impermanent.
On lit, on écrit, on se recherche, on s’installe dans le désir d’établir des liens, des connections sensibles entre le monde des choses observables, le monde lumineux, éclatant, extérieur, extensible et le monde intime, ombrageux, énigmatique, songeur. On lit le monde, on en lit plusieurs, on décrypte des présages. On lit. On lie. On livre une interprétation probable. Tous les jours, on rassemble les morceaux de soi comme les pièces d’un puzzle. Sait-on qu’il est de notre intérêt qu’il reste incomplet? Même si un jour, on vient à bout d’un carnet d’écriture, on atteint la dernière page d’un livre?
On ouvre un livre pour intensifier ce rapport mystérieux entre sonorités, musicalités de la parole, de la langue et le mot enrobé de tout ce qui ne se dit pas et qui se révèle sans doute grâce aux silences que l’écriture impose soyeusement à la page. L’inversion se produit l’encre sombre montre et démontre la nature de la lumière. On s’inscrit plein de doute, on pose la question pour laquelle il n’y a pas de réponse satisfaisante.
L’architecture du livre me fait penser à celle d’une maison traditionnelle japonaise. Un espace intérieur proportionné, sobre et modifiable, où la répétition de certains éléments donne à l’ensemble de la construction une harmonie. De grandes ouvertures vers le jardin dont la présence est appuyée par des encadrements, de grandes ouvertures font que les limites entre intérieur et extérieur parfois disparaissent, s’évaporent. La maison d’Éric Chassefière a toujours une « fenêtre ouverte ». On y lit un signe de tolérance, une acceptation curieuse. Une ouverture d’esprit.
Les poèmes d’Éric Chassefière jouent sur les dualités: jour/nuit, lumière/ombre, silence/ bruit, corps/esprit, surface/profondeurs, écrit/indicible, intérieur/extérieur. Le poète déplace les frontières, maintient un équilibre dont il mesure en permanence la fragilité. Le ciel est une page. La page une fenêtre ouverte où s’installe l’écriture. Elle est trace, elle est peinture. Formulation de ce qui existe entre les lignes.
Au fil des pages, on s’aperçoit que l’écriture du poème n’est jamais terminée, qu’elle s’élabore peu à peu, qu’elle tente de faire corps, de se matérialiser. Faire, écrire un poème, exige du poète d’être. Être au monde, Être à l’écoute, Être en mesure de lui répondre. Par l’amour peut-être.
« Ouvrir la fenêtre c’était ouvrir la page en déployer au secret des mots ce profond ciel d’or tu devais ciel sur ciel faire pas du poème ouvrir seuil après seuil la voie vers le Tout maintenant le geste est accompli c’est ta vie que tu tiens entre tes mains le chemin de ta vie que tu réchauffes de ta paume main posée sur le cahier aux muettes collines »
Éric Chassefière, Le jardin est visage suivi de Dans l’invisible du chemin, préface d’Éric Barbier, 537ème Encres Vives, 32 pages, juillet 2024, 6,60€.
Cet ensemble de 50 poèmes pourrait se considérer comme un carnet de croquis où le poète note sur le vif les aspects divers et profonds qu’il découvre en contemplant un jardin. Éléments qui naturellement serviront à alimenter l’imaginaire, la pensée. Le répertoire lexical laisse entendre qu’il se dessine au-delà du jardin comme un portrait. Le jardin est visage, on s’y perd, on s’y retrouve et les forces qui s’en dégagent sont de nature semblable à celles qui se déploient dans cet autre jardin qu’est le poème. On porte en soi un jardin.
« L’écriture est incessante métamorphose »
« j’écris pour qu’ailleurs naisse ce jardin »
Lignes de force, ombres et éclats de lumière, feuillages, déclinaisons colorées de formes surprenantes. Chemins invisibles qu’écrivent les racines, les voies d’eau souterraines, tellement d’effluves florales supportent discrètement et presque mystérieusement les intentions du jardinier. Car derrière cette construction magique se cache son concepteur. Il appartient peut-être au lecteur d’en découvrir la force, grâce à ce que le jardin donne en croissant, en se modifiant au gré des saisons, en prenant la liberté de s’éloigner de la main qui l’a créé pour s’approprier des durées qui le dépassent. Notre questionnement de simple humain semble tellement dérisoire.
« on n’entend pas naître les mots le poème n’est-il lui-même miroitement dont chaque mot est apparition »
Comme la tourterelle, on ressent la nécessité absolue de s’abreuver à ses douceurs, de se nourrir à l’instar de la mouette de ses hauteurs brassées par le vent. La pluie advient, se mélange aux sèves, se glisse dans l’ombre, surgit dans un éclat. Lumineuse. Le temps cesse d’être déclinaisons de secondes, les heures deviennent élastiques, la nuit côtoie le jour sans plus lui reconnaître de limites coupantes et arbitraires.
« ce silence d’après le cri c’est en lui que rêve la pénombre dont la tourterelle a fait sa voix le grand arbre dort dans les mots »
« sentir comme la nuit est proche du corps comme parle loin le pas qui va sans rive »
« Soir tout à la clarté des bords au joyeux morcellement de la lumière »
En lisant ces poèmes, il est difficile de ne pas songer aux autres poètes pour lesquels le jardin devient bien plus qu’une métaphore de l’amour partagé qu’il est parfois impossible d’accepter, de l’écriture poétique elle-même qui devrait dépasser, surpasser le poète. Il cesserait de se contempler dans un simple miroir.
Le geste poétique d’Éric Chassefière dépasse la simple contemplation, la prise de conscience s’inscrit et prend racine dans la vie, ce qu’elle a d’éphémère, d’irrévocable. L’observation se doit d’être attentive, ouverte, sensible. L’écoute sincère et humble.
« le regard posé sur le jardin qui s’en fait la pensée le poème jamais écrit mémoire née de cette éternité » (…) s’éveiller à la vérité de soi (…) s’ouvrir au parfum de l’ombre (…) n’être que ce visage du jardin souriant à la lumière »
Continuer Encres Vives sur les pas de Michel Cosem – Appel à abonnement
Par Éric Chassefière
Michel Cosem s’en est allé, et c’est pour beaucoup d’entre nous, qui avons été lancés et accompagnés par Encres Vives, une perte douloureuse. Encres Vives, avec sa revue, fondée en 1960, et ses deux collections, Lieu (poèmes liant un poète à l’un de ses lieux favoris) etEncres Blanches (plus spécialement réservée aux nouveaux poètes et aux rééditions de recueils publiés par la revue), venues plus récemment en étoffer la production de recueils de poésie, c’est près de 2000 recueils et 400 auteurs publiés, dont beaucoup ont acquis au fil du temps une vraie reconnaissance dans le milieu poétique. Nous sommes nombreux à devoir beaucoup à Encres Vives, nombreux aussi à avoir éprouvé le besoin de revenir fréquemment aux sources en confiant nos écrits à Michel Cosem, qui disait de la revue :
« Tout en demeurant dans un format modeste Encres Vivescontinue d’attirer, de retenir, d’influencer des générations nouvelles, en faisant preuve à la fois d’exigence et d’ouverture. C’est là je pense une volonté affirmée qui regarde plus certainement vers l’avenir que vers le passé.
J’ai essayé de conserver l’enthousiasme du début, d’être attentif aux nouveaux, de les aider à se construire en bonne compagnie et il n’y a là rien que de très naturel. De là peut naître un rapport à la poésie avec qui il faudra compter. Cet afflux de nouveaux auteurs –et je ne saurais tous les citer – oblige à encore plus de rigueur mais aussi d’attention et de gestion. Mais aussi de demeurer en dehors des clans, des modes et des obligations que peuvent susciter les médias ou autres nouveautés. Avec comme volonté constante de demeurer à l’écoute de ce qui se passe ».
Sans connaître bien souvent directement Michel, nous nous étions habitués à ses missives bienveillantes en retour des envois de propositions de recueils que nous lui adressions. Des mots toujours posés et encourageants, une fidélité sans faille dans le soutien aux nouveaux auteurs, passant dans certains cas, après quelques années, par un numéro spécial. Michel était la discrétion et la bienveillance même, ouvert à toutes les formes de poésie pourvu qu’elles soient authentiques, expressions sincères d’un engagement fort dans l’époque qui les porte. Il écrit ainsi dans le numéro 62-63 d’Encres Vives, daté de l’hiver 1967-1968, consacré à la civilisation occitane : « … l’écrivain, et plus spécialement le poète est situé dans sa civilisation, non d’une manière logique, mais par le fait même d’écrire : il engage tout de lui-même et en même temps tout de sa civilisation. L’époque des écrivains qui puisaient ici et là leur inspiration semble révolue, de même que celle de l’écrivain qui décidait de se consacrer à son clocher en exaltant un passé mort. L’écrivain – s’il n’est pas un faiseur – est tout entier l’homme de son époque. Et s’il ne l’est pas, il doit tendre à le devenir ». Homme d’une civilisation et d’un territoire, Michel Cosem l’était au premier chef, dans cette Occitanie tant aimée, berceau de sa famille paternelle, qu’il arpentait de ses pas et ses mots.
La collection Lieu d’Encres Vives, que Michel définissait ainsi : « cette collection propose des poèmes liant un poète à l’un de ses lieux favoris : voyage, rêverie, méditation, quotidien, biographie, reportage », constitue précisément une ligne par laquelle de nombreux poètes, ancrés dans un terroir, ou voyageurs en quête au contraire de déracinement, ont pu exprimer leur relation, réelle ou rêvée, au monde qui les entoure. Qui, mieux que Michel Cosem, a su faire partager par sa poésie l’âme d’un lieu ? Avec près de 400 numéros, dans lesquels se sont exprimés plus de 160 auteurs, la collection Lieu d’Encres Vives, constitue un terreau d’humanité unique, tant par la diversité des lieux explorés, que par la façon de les appréhender. Cette collection fut pour beaucoup d’entre nous, voyageurs-poètes, une bénédiction, permettant une formalisation rapide du carnet de poèmes, voyage dans le voyage, qui donne tant de relief aux lieux visités et aux personnes rencontrées.
Dans son souci d’aider les poètes à publier, Michel créa également la collection Encres Blanches, « plus spécialement réservée aux nouveaux poètes », qui en 20 ans d’existence a révélé, ou aidé à mieux faire connaître, à travers la publication de près de 800 recueils, plus de 300 auteurs. Une entreprise considérable, regroupant une part significative de la communauté des poètes français, certains ayant ensuite fait leur chemin et acquis une vraie reconnaissance. Au total, en incluant la revue et les deux collections, c’est près de 400 poètes qu’Encres Vives a publiés, et pour une grande partie d’entre eux révélés au public.
Nous avons, avec plusieurs membres du comité de rédaction, décidé, fidèles à l’esprit impulsé par Michel Cosem, de nous tourner vers l’avenir, ainsi qu’il le préconisait, et continuer Encres Vives, dont l’immense héritage, tant humain que littéraire, ne peut rester lettre morte. Faire vivre et fructifier la revue et les collections, dans l’esprit tracé par leur fondateur, au service d’une communauté de poètes toujours plus vivante et diverse, voilà l’objectif que nous nous sommes tracé pour les années qui viennent. La spécificité d’Encres Vives, rappelons-le, est la publication, dans chaque numéro, d’un recueil d’un seul auteur, 16 pages au format A4, qui vont devenir 32 pages au format A5 à partir de janvier 2024. La revue restera mensuelle, avec 12 numéros par an et la possibilité, pour un surcoût modeste, de recevoir dans l’année 2 volumes de chacune des collections Lieu et Encres Blanches. L’abonnement donnera droit à un tarif préférentiel pour l’achat de n’importe quel volume de ces deux collections.
Nous vous invitons, chers lecteurs de Traversées, à nous rejoindre dans notre démarche (bulletin d’abonnement joint), et vous remercions de transmettre l’information aux personnes de votre connaissance qui pourraient être intéressées.
Bulletin d’abonnement à Encres Vives à télécharger sur ce lien
Annie Briet, Catherine Bruneau, Éric Chassefière (directeur de la publication), Jean-Louis Clarac, Jean-Marie David-Lebret, Michel Ducom, Gilles Lades, Jacqueline Saint-Jean, Christian Saint-Paul.
Eric Chassefière, Présence du masque, Collection Arcane, Éditions Sémaphore, décembre 2019, 88p, 12€
Dans le geste poétique d’Eric Chassefière, il y a celui du chef d’orchestre qui pour extraire la musique d’une masse statique et encore assoupie doit s’ancrer solidement avant d’élancer ses bras dans le vide. Se produit alors une sorte de miracle: la musique naît, son essence se révèle, sa nature se décline en une infinité de variations sensibles. Il y a une volonté d’orchestrer le monde sensible, les sensations et les émotions, d’harmoniser comme le ferait un peintre ou le sculpteur cherchant à joindre entre elles les parcelles d’ombres et de lumières, les espaces silencieux, les creux et les pleins aux proportions infinies.
Souvent le passage des jours, leurs errances mêlées à celle de l’homme rythment l’écriture comme pour le journal intime. On lit aussi un questionnement personnel et fondamental d’appartenance au monde grâce à l’observation de la nature pour ce qu’elle nous révèle de nous-mêmes et de l’autre. La vie sensible et rêveuse du poète, rend possible son adhésion malgré la solitude aux fourmillements de la foule, à ces exclamations.
Eric Chassefière ne se contente pas de rester en retrait, de contempler et de merveilleusement décrire. Le poète explore, erre comme dans un labyrinthe qui ne cesse de lui renvoyer des reflets, miroirs où l’on se regarde, fenêtres d’où l’on contemple les autres. Le monde est un spectacle, un théâtre un tableau, un livre, un recueillement de mots.
Le masque, les masques sont les visages que la vie nous fait porter comme si nous avions plusieurs rôles à jouer. Le masque est le visage que nous renvoie la mort lorsqu’elle se rapproche, le masque est une frontière, une lisière, une ombre, la possibilité peut-être de se mettre dans la peau de quelqu’un d’autre. Difficile de dire ce qu’il y a derrière le masque mais sa présence atteste aussi d’une vie nourrie de souvenirs, parée de reflets multiples, d’ombres et de lumières, de creux et de vides. Errer dans les rues d’une ville, voyager au creux des jours, rêver et écrire de la poésie nous permet sans doute l’introspection indispensable. Le poète est un visiteur de l’ultime et habite l’impossible.
Ce recueil comporte quatre grandes parties dont je reprends ici quelques mots et images significatives en lesquels se reflètent toutes les qualités de ce recueil.
Lisboa song
« Ici on entend la lumière tisser la pierre le ciel bleu chanter l’ombre murmurer la source »
« assis là sur le rebord de la jetée dans l’irisation de l’espace à s’écouter murmurer la vie vagues caressant des pierres »
« En lui tout tremblant d’aube et de sel l’océan levé de la parole »
« Il marche à l’intérieur de lui-même »
« Intrication des temps et des lieux dispersion des mots comme un bouquet de mouettes »
et p30 un poème résumant le propos
« miroitement noir des images au fond des mots des lèvres traversées de leur tissage dans le miracle de nommer enlacer le silence au murmure de loin en loin se retrouver oubli après oubli s’endormir ensemble partager le chant d’un arbre le bouquet d’un oiseau dans l’obscurité confondue de nos retours »
Les mots errants
« respirer mot après mot le vent du soir »
« leurs vies tout au fond des mots dansaient secrètement liées dans la marche des souvenirs»
« habiter tous les chemins possibles de l’instant »
« c’est au crayon du silence qu’il griffonne les mots paupières baissées sur le dessin intérieur
ce courant de vie qui le traverse cette rumeur joyeuse qui s’installe en lui ces courses de l’enfant qu’il fut ces mots éternels de l’amour ancien et futur » Voilà qui fait une tentative heureuse de dire ce qu’est le poème.
« La ville devient labyrinthe de sa mémoire il s’y déplace comme en lui-même »
« il aime cette solitude divine que le rêve prenne couleur de fruit »
« Il va son chemin d’errance parmi les voix profonde respiration de ces journées à déambuler porté par la vague du pur désir d’être le chemin naît de l’écriture simple du masque »
Évocation de l’absent, avec reflets
dédié au père de l’auteur
« nul bruit de pas sur le chemin plus personne aujourd’hui on ne le rencontre plus lui qui ne sut habiter que l’horizon »
Présence du masque
qui donne son titre au recueil
« ce visage en lui est aussi ce miroir cette duplication sans fin de sa présence cet effacement permanent du corps par le corps qui est condition de l’étreinte véritable »
« tous ces visages aimés en lui alors n’en forment qu’un seul le libérant de l’angoisse qui l’étreint »
« cette aube en lui au fond des mots »
« Tenir haut en lui le rêve porter haut la joie d’aimer célébrer le mystère de l’autre l’énigme sans fin du sentiment »
« lui cherche les mots de son amour dans la langue chatoyante du silence vent et lumière rentrés en lui »