Barbara AUZOU,GRAND COMME, Préface de Ile Eniger, Poèmes,éditions unicité.

Barbara AUZOU,GRAND COMME, Préface de Ile Eniger, Poèmes,éditions unicité.


Une sorte de murmuration d’oiseaux qui passe au-dessus d’un arbre, le premier sans doute de la création, telle se présente la sobre et belle illustration de couverture signée Francine Hamelin qui sait sculpter la poésie jusque dans le marbre.

GRAND COMME, dès ce titre ouvert on pense à l’enfant qui ne trouve encore les mots pour dire son amour :  »Je t’aime grand comme ça–, dit-il en écartant les bras, ou bien  »Je t’aime jusqu’à la lune » répète-t-il en élevant le bras vers le ciel. Barbara Auzou prouve par ce titre qu’elle garde pour la vie un appétit d’enfance à la fois neuf et sans limite :

 »nos yeux d’horizon ne sont jamais que l’intérêt infini que nous prenons à vivre » 

 Elle est partie prenante de ce cycle élevé, infini, et toujours neuf de la vie ; 

 »la lumière est venue de très loin et à pied / elle s’est installée dans nos silences alternés / dans nos rides

Oui, le temps passe, et parfois non sans dégâts de tous ordres, est-ce une raison pour ne parler que de déclin alors que tout vit et renaît sans cesse en ce Grand Tout qu’est le monde ? Les enfants qui vivent à fond l’instant pensent-ils à la déchéance, à la mort ?

 »Et vois comme on égale les dieux là parmi les arbres tapis d’enfance qui se partagent nos noyaux./ …et les étoiles qui dansent là-haut »

 »Pour vivre heureux vivons cachés » n’est pas le choix de Barbara Auzou ; pour elle, l’amour est inclus dans le cycle du monde au présent perpétuel avec, au jour le jour, et toutes les nuits, la quête de la joie à l’horizon :

 »C’est un envol les yeux ouverts qui a pris la dimension des choses regardées / enfin / et qui se tient loin du grand rouleau des peurs »

car, la poète le sait depuis la petite enfance :

  »La lumière est parfois quelque chose de plus que la lumière »

Si chez certains, les mots se multiplient, se salissent, se galvaudent et souffrent d’être une langue, chez Barbara ils ont gardé leur souffle premier, leur liberté native accompagnée de pauses d’écoute, tel le rossignol alternant musique et silence dans son chant d’harmonie qui s’élève au delà de la nuit :

un amour Grand comme un couchant qui vous transporte

Je n’ai jamais rien vu d’aussi inouï ni d’âme ni de corps

que ce soleil ce soir si tendrement mourant 

et notre silence passe au travers comme un oiseau tremblant

et me voilà confiante en d’autres espaces »

Ainsi nous sentons-nous à la lecture de ce recueil, comme l’oiseau ému, emplis de  »trouées d’enfance » et de  »lumière de première main » 

Il reviendra alors à chacun de relire ce recueil ainsi que son titre  »GRAND COMME », et de le mesurer à son idéal de vie personnel ; nul doute que le » rossignol  »de l’âme ne quitte la cage pour rejoindre l’immensité de la poésie, celle surtout qui élève et dont Barbara Auzou nous donne le la

Carolyne Cannella, Obscur éclat, poèmes, éditions Unicité.


Le récent ouvrage – Obscur éclat –  de la poétesse et musicienne Carolyne Cannella nous révèle une personnalité fragile et attachante, « graine jetée au vent », qui cherche sa place dans un monde particulièrement difficile à déchiffrer mais dont elle se sent irrémédiablement proche, décidée à en découvrir toutes les beautés pour le rendre acceptable mais aussi et surtout, pour trouver l’accès aux mystères dont il s’est habillement revêtu.

Cette entreprise poétique, Carolyne Cannella la construit avec des mots simples qui sont, eux aussi, habillés de mystère. Il s’agit de discerner les choses les plus universelles à travers le prisme de la vie ordinaire, parfois la plus intime, et ainsi d’accéder aux valeurs authentiques de l’existence.

                      L’âme scintille, sourire dans les ténèbres

Parmi ces valeurs, la plus volatile, mais la plus essentielle à un heureux équilibre, c’est la liberté qui autorise l’errance de la pensée, le droit à la rêverie, à butiner les plus belles fleurs. C’est cette liberté que l’on retrouve ici dans les mots et leur délicieux vagabondage ainsi que dans le jaillissement des images dont le vol incontrôlable et caressant sème une poésie envoûtante tout au long de ce recueil.

La poésie de Carolyne Cannella est bien une alchimie secrète entre les mots et le mystère du monde.