
Jacques Canut (né en 1930) a publié ces trois minces recueils au cours de l’été 2011. Il s’y montre tendrement attentif à la nature, aux êtres et, surtout, aux rencontres, aux hasards de la vie. Tout ce qui se passe – j’entends les événements de la vie courante, anodins – trouve en lui un poète soucieux de rendre ce qu’il voit, comme s’il voulait porter témoignage et proclamer que tout est poésie. « En ce calme bureau de poste, sur les bras de sa mère, à peine sortie de l’adolescence, un bébé d’origine africaine, aux traits remarquablement harmonieux et délicats, observe et suit attentivement, sensible et réfléchi, les gestes de l’employée. »
Comme pour un instantané, il s’agit de saisir l’essentiel d’une scène. Après, Jacques Canut se laissera peut-être prendre par une méditation. Toujours, il s’avance et observateur amoureux de la vie, même si, ici et là, quelque nostalgie vient sous sa plume : « [je] ne survis qu’égrenant ma retraite en jours d’austère solitude ». On n’évite pas l’âge et ses aléas…
Ce qui compte ici, c’est un ton, c’est une allure. Rien de tarabiscoté, de la prose dirait-on si n’éclataient ici et là des images comme « l’offrande du beau temps », « respirer sous les champs d’étoiles » ou des bonheurs d’écriture : « La montagne, aujourd’hui / a l’odeur glacée des vieillards / qui se laissent glisser / dans la nuit. »
On l’a compris, rien n’est plus étranger à ce poète que la pose, la recherche formelle à la limite de l’incompréhensible, la parole tonitruante. Il chante dans des murmures (c’est alors qu’il faut se montrer attentif), avance d’un pas égal, sans hâte, énonçant ses bonheurs et ses découvertes comme le ferait un aîné plein de sagesse. Une voix qui touche.
□ Georges JACQUEMIN
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